Albert Woerther — Wikipédia
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Albert Woerther (1920-1971) fut, pendant la Seconde Guerre mondiale, un agent du service secret britannique Special Operations Executive.
Identités
[modifier | modifier le code]- État civil : Albert Victor Woerther
- Comme agent :
- nom de guerre : « Justin »
- Nom de code opérationnel : WOODCUTTER (en français BÛCHERON)
- Autres pseudos : André, Pilule
Parcours militaire : SOE, section F ; grade : lieutenant.
Éléments biographiques
[modifier | modifier le code]Albert Woerther naît le à Strasbourg.
Après l'évacuation de la population frontalière vers la Haute-Vienne, titulaire du bac philo, il commence des études de médecine de à à l'école de médecine de Limoges. Il est ensuite successivement mobilisé dans l'armée française, prisonnier des Allemands qui le démobilisent comme Volksdeutscher, puis de retour en Alsace. Il s'inscrit à l'université de Heidelberg, où il poursuit ses études de médecine de à , puis à l'université de Strasbourg, rouverte par l'occupant, de à . Il refuse d'être incorporé au service du travail du grand Reich (Reichsarbeitsdienst), s'évade d'Alsace, passe la ligne de démarcation et rejoint l'université de Strasbourg repliée à Clermont-Ferrand. Dès son arrivée, il entre dans le mouvement Franc-Tireur et participe au plasticage du siège du PPF de Vichy.
Il est arrêté le , et incarcéré à Clermont-Ferrand, puis à Cusset (près de Vichy) et finalement à la prison Saint-Paul à Lyon. Le tribunal d'état de Lyon, siégeant à huis clos sous la présidence de Joseph Darnand les 23 et , le condamnent à dix ans de travaux forcés. De Lyon, il est transféré à la centrale d'Eysses à Villeneuve-sur-Lot.
Le , avec 53 autres prisonniers, il s’évade de nouveau, traverse les Pyrénées à pied, passe par l’Espagne, et atteint l'Angleterre le .
Recruté par le SOE, il est formé dans les Special Training Schools. Il est volontaire pour une mission en France.
- Mission
Définition de la mission : monter et diriger le réseau WOODCUTTER, en Lorraine[1]. Il apporte de l’argent au réseau MASON.
Il est parachuté, dans la nuit du 18 au , sur les hauteurs de La Rochepot (Côte-d'Or), non loin de Chagny. Le parachutage et la récupération du matériel s’effectuent sans encombre. Mais l’arrivée de « Justin » n’en fut pas moins mouvementée : une dénonciation a conduit à la déportation des épouses du chef du groupe chagnotin et de son adjoint, et à la destruction totale des biens de ce dernier. Mais grâce à la sagesse de l’équipe d’accueil, les dégâts furent contenus.
Le service homologue huit opérateurs radio formés par Marcel Jaurant-Singer à Chagny et lui adjoint l'un d'eux, Armand Bouvier « Tactful ».
Dès la libération, il reprend ses études de médecine à la faculté de Nancy, où il soutient sa thèse en 1947.
Après la guerre, Albert Woerther s’établit médecin en Lorraine.
Il décède le à Vic-sur-Seille.
Reconnaissance
[modifier | modifier le code]Distinctions
[modifier | modifier le code]- Royaume-Uni : Military Cross,
- France : Croix de guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance, Médaille militaire.
Monuments
[modifier | modifier le code]Annexes
[modifier | modifier le code]Source : Un Alsacien Parachuté, article publié dans les Dernières Nouvelles d'Alsace le , signé par son frère Robert Woerther.
- Récit d'une nuit pas comme les autres pour un certain Justin en
« Ici Londres, les Français parlent aux Français ; d'abord quelques messages personnels : près du foyer ensemble... »
Ce , ces quatre mots signifient pour l'équipe du réseau Buckmaster le parachutage d'un agent. Dans ses mémoires, le radio Tactful (de son vrai nom Armand Bouvier), se souvient de ce parachutage de Justin, futur chef de réseau. Il devait avoir lieu dans la nuit du 19 en Côte-d'Or, derrière le château de La Rochepot.
Armand, responsable du groupe, prend deux vélos, l'un pour Bureau, l'autre pour l'agent parachuté qu'il est prévu de conduire à Corpeau, où une chambre l'attend. Sont là également Vion fils, de Chagny, et le mécanicien du garage de Bureau. Vers minuit, le sac à dos Euréka (la radio) est fixé sur les épaules du mécano, l'antenne déployée. Je me tiens derrière lui, explique Tactful, casque d'écoute sur les oreilles, prêt à manipuler la lettre de code D. Les lampes sont en place : Vion et Bureau les allumeront sur ordre d'Armand, ce dernier a une lampe torche pour manipuler également la lettre D en direction de l'avion.
Deux heures d'attente, puis le radio entend le ronronnement déclenché par l'avion dans la balise Euréka. L'avion est dans l'axe de balisage. Le parachute jaillit de l'appareil qui disparait dans la nuit. Le temps de descente est bref. Et voilà toute l'équipe à la recherche du parachute. Où diable a-t-il pu s'égarer ? Tout à coup, l'homme émerge des fourrés. On court vers lui. Justin a retrouvé le sol de France. De fait, nos appels bruyants, note le radio, l'avaient surpris; il doutait de l'identité du petit groupe. Ses bagages sont réduits : de l'argent, une cinquantaine de quartz pour les postes de radio, les plans de travail et les soies de chiffrement et de déchiffrement, quelques boîtes de cigarettes, peu de vêtements, un curieux bleu de travail avec dans la poche une pince pour sectionner les câbles, et enfin une étonnante mallette grenat toute petite, contenant des faux passeports allemands.
Justin veut gagner Paris, explique-t-il à Armand. Bureau et Justin partent à vélo. Les autres ne sont pas pressés, ils discutent du télégramme que doit préparer Armand pour Londres. Tout à coup arrivent les deux cyclistes essoufflés et blêmes : en entrant dans la propriété de Bureau, ils ont aperçu sa femme sur une chaise au milieu de la cour, entourée d'Allemands. Le lendemain, ils apprendront que la maison a été pillée et incendiée et plus tard que deux de leurs femmes ont été déportées. Si Justin était parti à Corpeau, il était pris par la Gestapo. Le point de repli possible, l'Hôtel du Commerce à Rully, est pris pour rendez-vous le soir même.
Justin s'appelait en fait Albert Woerther, alsacien réfractaire au RAD (Reichsarbeitsdienst), arrêté dans la résistance à Clermont-Ferrand, évadé vers Londres. Il est mort en 1971. Cet article est un hommage de son frère Robert.
Notes
[modifier | modifier le code]- Là où depuis trop longtemps, le service pensait disposer du réseau ARCHDEACON, opéré par Goetz du Sicherheitsdienst depuis l'arrestation de Frank Pickersgill « Bertrand » et de John Macalister « Valentin », le 21 juin 1943.
Sources et liens externes
[modifier | modifier le code]- Fiche Albert Woerther : voir le site Special Forces Roll of Honour.
- Libre Résistance, bulletin d’information et de liaison, anciens des Réseaux de la Section F du S.O.E. (Special Operations Executive), Amicale BUCK, numéro 3, , p. 2, article Albert WOERTHER (Justin) de Marcel Jaurant-Singer ; et p. 4.
- Revue de la France libre, no 310, 4e trimestre 2000. Article de Julien Hanau.
- Michael Richard Daniell Foot et Jean-Louis Crémieux-Brilhac (annot.) (trad. Rachel Bouyssou), Des Anglais dans la Résistance : le service secret britannique d'action (SOE) en France, 1940-1944, Paris, Tallandier, (ISBN 978-2-847-34329-8) Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) M. R. D. Foot, SOE in France an account of the work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London London Portland, OR, Whitehall History Pub. Frank Cass, (ISBN 978-0-714-65528-4) Ce livre présente la version officielle britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence essentielle sur le sujet du SOE en France.
- Lt. Col. E.G. Boxshall, Chronology of SOE operations with the resistance in France during world war II, 1960, document dactylographié (exemplaire en provenance de la bibliothèque de Pearl Witherington-Cornioley, consultable à la bibliothèque de Valençay). Voir sheet 25, WOODCUTTER CIRCUIT.