Anneau de Cohen-Macaulay — Wikipédia
En algèbre commutative, un anneau de Cohen-Macaulay est un anneau noethérien qui n'est pas nécessairement régulier, mais dont la profondeur est égale à sa dimension de Krull. Une singularité de Cohen-Macaulay est une singularité dont l'anneau local est un anneau de Cohen-Macaulay. Les anneaux portent le nom d'Irvin Cohen et Francis Macaulay.
Dans la hiérarchie des anneaux, on a les inclusions suivantes :
- Anneau universellement caténaire anneau de Cohen-Macaulay anneau de Gorenstein anneau d'intersection complète anneau local régulier.
Définitions
[modifier | modifier le code]Suite régulière
[modifier | modifier le code]Soit un module sur un anneau ; un élément est dit régulier si pour un implique .
Une suite d'éléments est appelée suite - régulière si les conditions suivantes sont remplies :
- ;
- Pour l'image de dans n'est pas un diviseur de zéro.
Profondeur d'un module
[modifier | modifier le code]Soit un module sur un anneau ; la profondeur de est la longueur maximale d'une suite -régulière d'éléments de .
Dimension d'un module
[modifier | modifier le code]La dimension d'un module sur un anneau est la dimension de Krull de , où est l'annulateur de .
Pour un module de type fini sur un anneau noethérien, on a :
où désigne l'ensemble des à idéaux premiers associés à , et le support du module.
Pour un module de type fini sur un anneau local noethérien on a l'inégalité :
- .
Cohen-Macaulay
[modifier | modifier le code]Un module de type fini sur un anneau noethérien est appelé un module de Cohen-Macaulay si pour tous les idéaux maximaux de on a :
- .
est un anneau de Cohen-Macaulay si en tant que module, est un module de Cohen-Macaulay[1].
Exemples d'anneaux de Cohen-Macaulay
[modifier | modifier le code]- La localisation d'un anneau de Cohen-Macaulay.
- Un anneau noethérien de dimension 0 ou, de manière équivalente, un anneau artinien.
- Un anneau noethérien de dimension 1 réduit.
- Un anneau noethérien de dimension 2 normal.
- Un anneau noethérien régulier, comme les entiers , ou l'anneau des polynômes sur un corps , ou un anneau de séries formelles
- Un anneau de Gorenstein.
- L'anneau des invariants , où est un anneau de Cohen-Macaulay sur un corps de caractéristique 0 et est un groupe fini ou plus généralement un groupe algébrique linéaire dont la composante identité est un groupe réductif. C'est le théorème de Hochster-Roberts (en).
- Un anneau de Cohen-Macaulay est un anneau caténaire.
- Un anneau déterminant (« determinantal ring » en anglais). Soit le quotient d'un anneau local régulier par l'idéal engendré par les mineurs de taille des matrices à éléments dans . Si la codimension (ou hauteur) de est égale à la codimension , alors est appelé un anneau déterminant. Dans ce cas, est un anneau de Cohen-Macaulay[2] De même, les anneaux de coordonnées des variétés déterminantes sont des anneaux de Cohen-Macaulay.
- Anneaux de polynômes :
- L'anneau est de dimension 0 et donc est de Cohen–Macaulay, mais il n'est pas réduit et donc n'est pas régulier.
- Le sous-anneau de l'anneau de polynômes , ou sa localisation ou sa complétion en , est un domaine de dimension 1 qui est Gorenstein et donc Cohen–Macaulay, mais il n'est pas régulier. Cet anneau peut auss être vu comme l'anneau des coordonnées de la courbe cubique sur .
- Le sous-anneau de l'anneau des polynômes , ou sa localisation ou complétion en , est un domaine de dimension 1 qui est Cohen–Macaulay mais n'est pas Gorenstein.
- Les singularités rationnelles sur un corps de caractéristique zéro sont des singularités de Cohen-Macaulay.
- Les variétés toriques sur n'importe quel corps sont des variétés de Cohen-Macaulay[3]. Le programme du modèle minimal fait un usage important des variétés avec des singularités de type klt (pour Kawamata log terminal) ; en caractéristique zéro, ce sont des singularités rationnelles et donc des singularités de Cohen-Macaulay[4]. Un analogue des singularités rationnelles en caractéristique positive est la notion de 'F-singularité rationnelle ; là encore, de telles singularités sont des singularités de Cohen-Macaulay[5].
- Soit une variété projective de dimension sur un corps, et soit un faisceau sur . L'anneau de section de
- est Cohen-Macaulay si et seulement si le groupe de cohomologie est nul pour tout et tous les entiers j[6]. Il s'ensuit, par exemple, que le cône affine sur une variété abélienne est Cohen-Macaulay lorsque est de dimension 1, mais pas lorsque a une dimension d'au moins 2 (car n'est pas nul).
Exemples géométriques
[modifier | modifier le code]- Soit un corps ; la variété algébrique composée de l'axe des X et de l'axe des Y, est décrite par l'anneau de coordonnées . Le point d'intersection est décrit par l'anneau
- C'est une singularité parce que est unidimensionnel, mais l'idéal maximum de ne peut être engendré que par deux éléments. D'un autre côté, est un anneau de Cohen-Macaulay (et même de Gorenstein), puisque l'idéal maximal ne contient pas que des diviseurs de zéro.
- Une singularité plus compliquée est dans l'anneau
- L'anneau local associé à la singularité
- n'est pas un anneau de Cohen-Macaulay. Il est unidimensionnel, mais l’idéal maximal n’est constitué que de diviseurs de zéro, il n’y a donc pas de suite régulière.
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Michael Francis Atiyah et Ian Grant Macdonald, Introduction to commutative algebra, Addison-Wesley publ, coll. « Addison-Wesley series in mathematics », (ISBN 978-0-201-00361-1)
- Winfried Bruns et Jürgen Herzog, Cohen–Macaulay Rings, Cambridge University Press, coll. « Cambridge Studies in Advanced Mathematics » (no 39), (ISBN 978-0-521-41068-7, MR 1251956)
- Irvin Cohen, « On the structure and ideal theory of complete local rings », Transactions of the American Mathematical Society, vol. 59, no 1, , p. 54–106 (ISSN 0002-9947, DOI 10.2307/1990313 , JSTOR 1990313, MR 0016094)
- (en) « Cohen–Macaulay ring », dans Michiel Hazewinkel, Encyclopædia of Mathematics, Springer, (ISBN 978-1556080104, lire en ligne)
- David Eisenbud, Commutative Algebra with a View toward Algebraic Geometry, vol. 150, Berlin, New York, Springer-Verlag, coll. « Graduate Texts in Mathematics », (ISBN 978-0-387-94268-1, DOI 10.1007/978-1-4612-5350-1, MR 1322960)
- William Fulton, Introduction to Toric Varieties, Princeton University Press, (ISBN 978-0-691-00049-7, DOI 10.1515/9781400882526, MR 1234037)
- William Fulton, Intersection Theory, Berlin, New York, Springer-Verlag, coll. « Ergebnisse der Mathematik und ihrer Grenzgebiete. 3. Folge. » (no 2), , 2e éd. (ISBN 978-3-540-62046-4, MR 1644323)
- Robin Hartshorne, Algebraic geometry, Springer, coll. « Graduate texts in mathematics », (ISBN 978-0-387-90244-9)
- János Kollár et Shigefumi Mori, Birational Geometry of Algebraic Varieties, Cambridge University Press, (ISBN 0-521-63277-3, DOI 10.1017/CBO9780511662560, MR 1658959)
- János Kollár, Singularities of the Minimal Model Program, Cambridge University Press, (ISBN 978-1-107-03534-8, DOI 10.1017/CBO9781139547895, MR 3057950)
- Ernst Kunz, Einführung in die kommutative Algebra und algebraische Geometrie: mit 185 Übungsaufgaben, Vieweg, coll. « Vieweg-Studium Aufbaukurs Mathematik », (ISBN 978-3-528-07246-9)
- Francis Sowerby Macaulay, The Algebraic Theory of Modular Systems, Cambridge University Press, (ISBN 1-4297-0441-1, DOI 10.3792/chmm/1263317740, MR 1281612, lire en ligne)
- Hideyuki Matsumura, Commutative Ring Theory, Cambridge University Press, coll. « Cambridge Studies in Advanced Mathematics », (ISBN 978-0-521-36764-6, MR 0879273)
- Karl Schwede et Kevin Tucker, « A survey of test ideals », dans Progress in Commutative Algebra 2, Berlin, Walter de Gruyter, (Bibcode 2011arXiv1104.2000S, MR 2932591, arXiv 1104.2000), p. 39–99.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Cohen–Macaulay ring » (voir la liste des auteurs).
- Bruns et Herzog 1993, def. 2.1.1
- Eisenbud 1995, Théorème 18.18..
- Fulton 1993, p. 89.
- Kollár et Mori 1998, Théorèmes 5. 20 et 5.22.
- Schwede et Tucker 2012, Appendix C.1.
- Kollár 2013, (3.4).