Ephraim Al-Naqawa — Wikipédia
Ephraim Al-Naqawa | |
L'Arrivée du rabbin à Tlemcen. | |
Présentation | |
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Nom de naissance | Ephraim ben Israël al-Naqawa |
Surnom(s) | Rabb |
Naissance | Tolède |
Décès | Tlemcen |
Lieu de sépulture | Espagne Algérie |
Dynastie | Séfarades |
Œuvre | Chaar Kevod Adonaï |
Prise de ses fonctions | Rabbin, médecin, écrivain |
Père | Israël Al-Naqawa |
Famille | Al-Naqawa |
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Ephraim Al-Naqawa (hébreu : אפרים בן ישראל אל-נקווא Ephraim ben Israël al-Naqawa), ou Ibn al-Nakawa[1] (en arabe : ابن النّْقَاوَة) est un rabbin, médecin et théologien séfarade du XIVe siècle (1359 - 1442). Figure emblématique de la communauté juive de Tlemcen, il est connu de nombreux Juifs algériens sous le seul nom du Rabb (ou Rab, Rav (« [le] Maître »))[2].
Éléments biographiques
[modifier | modifier le code]Né en 1359 à Tolède, il fuit l’Espagne en 1391, à la suite des persécutions contre les Juifs de Castille, au cours de laquelle son père Israël Al-Naqawa, auteur du Menorat Hamaor, meurt sur le bûcher. Il s’établit à Tlemcen dont il devient le rabbin. Il y acquiert une renommée importante et une réputation de faiseur de miracles.
En dehors de son père, chez qui il a probablement étudié, Ephraim Al-Naqawa aurait peut-être eu comme maître, d'après l'historien Simcha Assaf, le rabbin Johanan (ou Yohanan) Treves[3],[4] Cette hypothèse est basée sur l'identification d'Al-Naqawa comme l'auteur du commentaire biblique dit « de Rabénou Ephraim » qui désigne à plusieurs reprises Johanan Treves comme son maître[5]. Cependant, cette identification est problématique et tous les historiens n'accordent pas à Al-Naqawa la paternité de cette œuvre.
Personnage hautement vénéré par les Juifs de Tlemcen, il meurt en 1442, en l’année Rab (ר"ב) du calendrier hébraïque. Sa tombe devient rapidement l’un des lieux de pèlerinage les plus fréquentés par les Juifs d’Afrique du Nord à l’occasion de la hiloula de Lag Ba'omer[6] jusqu’à l’indépendance de l’Algérie, suivie du départ des Juifs à partir de 1962.
En 2005, un groupe de 132 pèlerins français est autorisé à venir se recueillir sur la sépulture du Rav Al-Naqawa, accompagné de l’ambassadeur de France en Algérie. Cette visite a un grand retentissement dans le pays[7]. Une nouvelle visite est organisée en 2010, mais elle est annulée par les autorités algériennes à la suite de l’abordage de la flottille pour Gaza[8].
Traditions
[modifier | modifier le code]Selon les traditions des Juifs d’Algérie, il serait arrivé aux portes de Tlemcen la veille d’un chabbat, juché sur un lion qu’il aurait harnaché avec un serpent. Abandonnant sa caravane sur la route de Honein à Tlemcen, le 5 kislev 5155[9] (30 octobre 1394), afin de ne pas transgresser le chabbat, il se retrouva seul en milieu hostile et entouré de bêtes sauvages. À l'approche de la nuit, s'approcha de lui un effroyable lion, sereinement, qui vint s'asseoir à ses côtés « tel un chien près de son maître »"[10]. Le lion resta ainsi assis, le protégeant des autres animaux qui fuyaient le rabbin par peur du lion. À la sortie du chabbat, un serpent alla se placer dans la bouche du lion, recroquevillé vers sa nuque, tel un licou. Le rabbin prit place sur le dos du lion, tenant le serpent, et arriva ainsi à Tlemcen[11]. Hayim Bliah doute de l’authenticité de ces faits mais fait remarquer qu'il est évident que cette légende indique la grandeur réelle de l'homme[12].
Bliah raconte, au nom du rabbin Hayim Kasbi, qu'une nuit, il eut droit à la visite de trois éminents rabbins, le Ri"f, le Ri Migash et Maïmonide, quoique décédés, qui étudièrent avec lui toute la nuit. Ceci, à la suite de son effort pour démontrer la justesse de leurs propos. Là encore, Hayim Bliah doute de la véracité des faits, estimant qu'il s'agit certainement d'un rêve, et que la légende raconte qu'il était éveillé du fait de sa renommée[10].
Il aurait aussi, à l’instar de Moïse, fait jaillir l’eau de la pierre à l’entrée de la ville, afin d’étancher sa soif, ce qui l’aurait fait connaître du régent de l’époque, le sultan Abu Tashfin, impressionné par ces miracles. Il aurait plus tard également guéri la fille unique du sultan avec un remède fort simple, refusant tout salaire monétaire, mais demandant que les Juifs, qui vivaient jusque-là dans les localités voisines de Honein et Agadir, soient autorisés à résider dans la ville de Tlemcen elle-même[2].
Ce dernier point est corroboré au moins en partie par des archives d’époque puisque c’est avec l’autorisation du sultan que le Rav fait construire en 1393 le premier lieu de culte juif à Tlemcen. La grande synagogue de Tlemcen, qui forme le centre du quartier juif, sera bâtie sur ce site[13].
Œuvres
[modifier | modifier le code]Ephraim al-Naqawa est l’auteur du Chaar Kevod Adonaï (Portique de la Gloire de Dieu), un traité de philosophie juive rédigé à l’intention de son fils aîné Israël, où il répond aux critiques de Nahmanide sur le Guide des Égarés de Maïmonide. Conservé en manuscrit à la Bibliothèque bodléienne, l’ouvrage est publié par le rabbin Hayim Bliah qui l’agrémente de notes savantes qu'il titre Petah Ha-Chaar (Ouverture du Portique). Le livre a été réédité en Israël en 1986 avec de nouvelles introductions biographiques sur les rabbins Al-Naqawa et Bliah par le rabbin Eliyahu Atsur du tribunal rabbinique de Jérusalem[14].
Il a également composé quelques hymnes religieux et serait peut-être, d'après l'historien Simcha Assaf, l'auteur du commentaire biblique dit « de Rabénou Ephraim »[4],[5].
Problématique de la relation avec Rabbi Johanan Treves
[modifier | modifier le code]Le commentaire dit « de Rabénou Ephraim » fait référence, à plusieurs reprises, au rabbin Johanan (ou Yohanan) Treves[3], qu'il déclare être son maître[5].
Selon l'historien Simcha Assaf, Al-Naqawa serait peut-être l'auteur de cette œuvre[4], ce qui signifierait qu'il aurait eu comme maître Johanan Treves.
Simon Schwarzfuchs recommande[15], quant à lui, la plus grande prudence à propos de cette identification de l'auteur du commentaire, et par conséquent, de la filiation spirituelle à Johanan Treves qui en ressortirait. En effet, selon Gershom Scholem[16], le commentaire biblique dit « de Rabénou Ephraim » qu'avait Assaf est sensiblement différent de son homonyme édité en 1950 à Johannesbourg. Selon Assaf, ce texte n'est pas celui que détenait le Hid"a et qui a été imprimé à Salonique en 1851. Ce manuscrit, écrit Scholem, était défectueux, alors que celui de Munich[17] est bien plus complet. D'après Assaf, notre texte cite quelques commentaires qui se trouvent dans l'autre, sans que l'on puisse établir lequel a copié l'autre ou s'ils n'ont pas utilisé tous les deux une source plus ancienne désormais disparue.
Simcha Assaf écrit "נראה לי לשער שמחבר הפירוש שלנו הוא ר' אפרים אלנקואה" (« Je pense qu'il faut estimer que l'auteur du commentaire présent est R. Ephraim Al-Naqawa »), sans réellement l'affirmer. Il précise cependant que la non-mention du nom de son père ne doit pas étonner, puisqu'il ne le fait pas non plus dans son Chaar Kevod Hachem. Selon Assaf, il aurait eu environ 25 ans lors de son départ en exil en 1391, ce qui le ferait naitre vers 1366. Or, toujours selon Assaf, l'auteur aurait été actif entre 1370 et 1420. Il serait plus qu'étonnant qu'Al-Naqawa ait écrit un livre à 4 ans. L'auteur cite d'ailleurs « feu Johanan Treves », alors que celui-ci est décédé en 1429. Johanan Treves a dirigé une yeshivah en France, à Paris, du vivant de son père, qui est décédé en 1385. Il est bien improbable qu'Ephraim Al-Naqawa ait pu la fréquenter. Nous ne savons rien d'un séjour éventuel en France. Il y avait alors de nombreux échanges avec les rabbins de Catalogne, mais nous ne voyons rien de semblable avec la Castille et le Sud de l'Espagne en général.
Le dernier auteur qui a mentionné cette œuvre[18] prend garde de mentionner un de ses élèves venu dans sa yeshivah en France, qui devint par la suite un des plus importants rabbins d'Algérie sans citer son nom.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) Yedida Kalfon Stillman et Norman A. Stillman, From Iberia to Diaspora : Studies in Sephardic History and Culture, BRILL, , 606 p. (ISBN 978-90-04-10720-5, lire en ligne)
- (en) Susan Slyomovics, The Walled Arab City in Literature, Architecture and History : The Living Medina in the Maghrib, routledge, (lire en ligne), page 83
- (en) « Treves », sur jewishencyclopedia.com.
- Dans (he) Salo W. Baron et Alexander Marx, מחקרים לזכרון ר׳ עמרם קאהוט : Jewish Studies In Memory of George A. Kohut 1874-1933, New York, Alexander Kohut Memorial Foundation, , 614 p., שמחה אסף: פירוש התורה לרבינו אפרים ז"ל (rapporté dans cet article (he) « מספרד לצפון אפריקה - השירה העברית במעבר »). Il semblerait qu'il y a une édition de Assaf du פירוש על התורה dans laquelle il aurait la même affirmation (rapporté par le אוצר הגדולים qui ne semble pas convaincu (he) Naftali Jacob Kohn, אוצר הגדולים אלופי יעקב, Haifa, , 286 p. (lire en ligne), p. 257 et (he) Naftali Jacob Kohn, אוצר הגדולים אלופי יעקב, Haifa, , 335 p. (lire en ligne), p. 138).
- (he) Ephraim Al-Naqawa, פירוש התורה של רבינו אפרים ז"ל, Johannesbourg, , 134 p. (lire en ligne), pp. 24, 28, 30, 34, 38, 41
- (en) David M. Gitlitz et Linda Kay Davidson, Pilgrimage and the Jews, Westport, Praeger, , p. 141-143
- Chahredine Berriah, « Des juifs en pèlerinage », El Watan, (lire en ligne)
- Serge Golan, « Les Juifs ne pélerineront pas à Tlemcen… », sur Hamodia, (consulté le ).
- L’année est incertaine. Selon Schwarzfuchs, dans Tlemcen, mille ans d'histoire d'une communauté juive, on trouve Al-Naqawa en 1393 à Marrakech, avant son arrivée à Tlemcen. On ignore combien de temps il resta à Honein, après Marrakech. 5155 est la première année après 1393 durant laquelle le 5 kislev est un vendredi, d'où la supposition de cette année. La date grégorienne est déduite de la date hébraïque.
- (he) Hayim Bliah, Chaar Kevod Adonai, Tunis, , Introduction biographique
- Simon Schwarzfuchs, Tlemcen : mille ans d'histoire d'une communauté juive, Paris, La Fraternelle, Union Nationale des Amis de Tlemcen, , 232 p. (ISBN 2-9509456 (édité erroné), BNF 35788658)
- (he) Hayim Bliah, Chaar Kevod Adonai, Tunis, , Introduction biographique, pp. 14-15
- Suzanne Slyomovics (dir.), The Walled Arab City in Literature, Architecture, and History: The Living Medina in the Maghrib. History and Society in the Islamic World, Routledge 2001, (ISBN 978-0-7146-5177-4), p. 83 - 85
- (he) Ephraim Al-Naqawa, Chaar Kevod Hachem, Jérusalem, Yechivat Tiferet Eliyahu, , 228 p. (lire en ligne)
- Correspondance privée avec le Professeur Schwarzfuchs.
- Annotations manuscrites sur le tiré à part de l'article cité de Simcha Assaf, Fonds Gershom Scholem de la Bibliothèque nationale d'Israël: http://aleph.nli.org.il:80/F/?func=direct&doc_number=000290561&local_base=NNL01.
- Heb 15
- (he) Joseph Hacker, « Rabbi Yochanan Treves in Italy and a Talmudic Academy in Padova in the 15th century », Zion, no LXXXVIII, , p. 480, n. 37 (ISSN 0044-4758)
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]Cette bibliographie présente quelques ouvrages de référence. Ceux utilisés pour la rédaction de cet article sont suivis du symbole .
- Simon Schwarzfuchs, Tlemcen : mille ans d'histoire d’une communauté juive, Paris, La Fraternelle: Union Nationale des Amis de Tlemcen, , 232 p. (ISBN 2-9509456 (édité erroné), BNF 35788658)
- Simon Schwarzfuchs, A l’ombre du Rab : le souvenir de Tlemcen, Paris, La Fraternelle: Union Nationale des Amis de Tlemcen, , 367 p. (ISBN 2-9509456-0-0)
- Achel Israel Hadas-Lebel, Rebi Ephraim Elnkaoua, Rab de Tlemcen, 1359-1442, Tlemcen, , 16 p.
- Abraham Meyer, Étude des mœurs actuelles des Israélites de Tlemcen : précédée d’une notice compète sur Rabenou Ephraim Aln’Caoua, Alger,
- (en) Susan Slyomovics, « Geographies of Jewish Tlemcen », The Journal of North African Studies, no 5, , p. 81-96 (ISSN 1466-9390, lire en ligne)
- (he) Haim Bliah, שער כבוד ה', Jérusalem, Yechivat Tiferet Eliyahu, , 228 p. (lire en ligne), Introduction biographique
- (he) Ephraim Al-Naqawa, פירוש התורה של רבינו אפרים, Johannesbourg, , 134 p. (lire en ligne)
Lien externe
[modifier | modifier le code]- Cet article contient des extraits de l'article « ALNAQUA » par Moses Beer, Richard Gottheil, Isidore Singer & J. S. Raisin de la Jewish Encyclopedia de 1901–1906 dont le contenu se trouve dans le domaine public.