Guerre arméno-turque (1918) — Wikipédia
Date | 15 mai 1918 a 4 juin 1918 |
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Lieu | Anatolie, Caucase, Iran Arménie orientale |
Casus belli | l'invasion de la Première République d'Arménie par l'Empire ottoman, qui cherchait à reprendre le contrôle des territoires perdus après la Première Guerre mondiale et à empêcher l'établissement d'un État arménien indépendant. |
Issue | Victoire Arménienne défensive [1],[2], traité de Batoum. Invasion ottomane de l'Arménie orientale repoussé. |
Changements territoriaux | Création de la première république arménienne avec les territoires proposé par le traité de batoum. |
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La guerre arméno-turque de 1918[10] ou Première guerre arméno-turque est une série d'initiatives militaires entreprises par l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale dans le cadre de la campagne du front caucasien. Sous la direction du ministre de la Guerre, Enver Pacha, les Ottomans cherchent à reprendre des territoires perdus et à réaliser des objectifs géopolitiques, notamment l'indépendance des peuples transcaucasiens.
Arrière Plans
[modifier | modifier le code]Au début de l'année 1918, des affrontements à grande échelle entre Azerbaïdjanais et Arméniens dans les provinces d'Erivan et d'Elizavetpol commencent à se produire presque quotidiennement, et les premiers incendies criminels de villages azerbaïdjanais et arméniens sont recensés. La Turquie joue un rôle négatif en attisant les tensions en Transcaucasie, ses représentants agitant activement la population musulmane. En conséquence, dans un contexte de lutte politique et d'anarchie, les actions des agents turcs sont devenues l'un des principaux instruments d'incitation aux conflits ethniques. Un homme politique géorgien, l'un des dirigeants des mencheviks, A. Chhenkeli, note que « la population musulmane armée, adhérant à l'orientation turque, se fait appeler soldats turcs et terrorise l'ensemble de la population chrétienne par ses manifestations anarchiques ». Une réunion des conseils nationaux arméniens et musulmans organisée à Tiflis n'aboutit à rien ; la tension continue de monter[2]
Entre-temps, en janvier 1918, rompant la trêve conclue en décembre 1917, les troupes turques, sous prétexte de protéger les musulmans pacifiques, profitant de l'effondrement du front et de la faiblesse de la Transcaucasie, lancent une offensive et s'approchent des frontières de la Transcaucasie[3]. Le 3 mars 1918, la paix de Brest est signée entre la Turquie et la Russie bolchevique, selon laquelle les troupes russes doivent quitter les districts d'Ardagan, de Kars et de Batoumi. Le Sejm de Transcaucasie ne reconnaît pas le traité et entame des négociations séparatistes avec la Turquie à Trapezund en mars. La Turquie rejette toutes les propositions et lance une offensive militaire[4] accompagnée de massacres d'Arméniens[5].
Espérant la paix, A. Chhenkeli, sans en informer le Sejm et les ministres arméniens de son gouvernement, ordonne au général F. Nazarbekov de livrer aux Turcs Kars qui, selon les experts, pouvait résister pendant plusieurs mois aux assauts des forces turques supérieures. La décision de rendre la forteresse provoque la panique parmi la population civile de la ville. En quelques heures, des milliers d'Arméniens fuient vers l'est, jusqu'aux frontières de la province d'Erivan. Le 25 avril 1918, des unités de la 3e armée ottomane entrent dans la forteresse et s'emparent de l'énorme stock d'armes et d'équipements. Les dirigeants arméniens de Tiflis, ayant appris tardivement la manœuvre cachée de Chhenkeli, renoncent à leurs portefeuilles dans son cabinet et exigent sa démission. La reddition volontaire de Kars n'arrête pas les troupes turques qui poursuivent leur offensive. Avec la perte de Kars, les forces arméniennes perdent toute possibilité de défense efficace et, le 28 avril, elles sont contraintes de se replier derrière Arpa Chay, en direction de la frontière
1877 Au même moment, le Sejm de Transcaucasie, malgré l'opposition de la délégation arménienne qui jugeait inopportun de rompre avec la Russie, déclare l'indépendance de la Transcaucasie et la création de la République fédérale démocratique de Transcaucasie. Le menchevik Akaki Chhenkeli, dont les représentants arméniens avaient exigé qu'il soit démis de ses fonctions à la suite de la reddition de Kars, non seulement n'est pas démis de ses fonctions, mais accède au poste le plus élevé de la nouvelle république transcaucasienne. Dans le gouvernement créé par lui, les Géorgiens, ainsi qu'au Seimas, occupent les postes les plus importants. Les Arméniens, qui se contentent de postes secondaires, sont contraints de poursuivre leur coopération dans le cadre d'un État indépendant afin de préserver les vestiges de l'Arménie orientale.
Le 11 mai 1918, des négociations entre la Turquie et la Fédération transcaucasienne s'ouvrent à Batum. Le gouvernement de cette dernière, représenté par le Premier ministre A. Chhenkeli, est prêt à accepter toutes les dispositions du traité de Brest-Litovsk. Cependant, le représentant de la Turquie, Halil-Bey, a déclaré que cela ne suffisait plus. Selon lui, les anciennes conditions sont inacceptables, car après la conférence de Trabzon, il y a eu des affrontements armés. Le représentant turc propose un projet de nouveau traité et demande son adoption immédiate. La Turquie revendique désormais non seulement l'Arménie turque et les districts de Kars, Ardagan et Batum, mais aussi les districts d'Akhaltsikh et d'Akhalkalak dans la province de Tiflis, ainsi que la partie occidentale de la province d'Erivan, y compris la vallée de la rivière Arax et la voie ferrée Alexandropol-Julfa qui longe la frontière avec la Perse. En outre, la République transcaucasienne, fortement réduite, devait être complètement subordonnée à la Turquie[.
Au même moment, sans donner au gouvernement de Transcaucasie le temps nécessaire pour prendre une décision et sans attendre de réponse, les autorités turques ordonnent l'invasion de la province d'Erivan. Le 15 mai 1918, après une défense vigoureuse mais de courte durée des Arméniens, les troupes turques s'emparent d'Alexandropol. La prise du district d'Alexandropol par les Turcs s'accompagne du massacre des réfugiés arméniens de Sarykamysh, Kars, Ardagan, Oltu et d'autres régions occupées par les troupes turques[9]. L'armée turque frappe ensuite vers le sud le long de la voie ferrée Erivan-Julfa et vers l'est le long de la ligne Karakilisa-Tiflis-Baku. Une semaine plus tard, les troupes turques et les milices musulmanes locales, d'une part, encerclent presque Erivan sur un front et, d'autre part, attaquent la ville arménienne de Karakilisa (aujourd'hui Vanadzor), qui est en fait la porte d'entrée de Tiflis. Entre-temps, la délégation turque aux négociations de Batum, inspirée par les succès militaires, présente un nouvel ultimatum à la République transcaucasienne, selon lequel aux revendications territoriales déjà existantes s'ajoutent celles de céder une grande partie de la province d'Erivan. Les Turcs donnent 72 jours au gouvernement d'A. Chhenkeli pour accepter l'ultimatum. De telles conditions sont inacceptables pour les Arméniens : leur acceptation signifie l'impossibilité de l'existence du peuple arménien[8]. Au même moment, alors que les hostilités sont actives en Transcaucasie, l'Allemagne négocie avec la Russie soviétique le partage des sphères d'influence dans le Caucase. Il était prévu que la région de Bakou soit dans la sphère d'influence de la Russie et que l'Allemagne bénéficie de préférences exclusives et d'un accès aux ressources énergétiques. L'invasion de la région par les Turcs a considérablement compliqué la réalisation des plans de l'empereur allemand. Les délégués et plénipotentiaires allemands exigent que la Turquie respecte les termes du traité de paix de Brest-Litovsk, ajoutant qu'ils ne justifieront plus les excès turcs à l'encontre de la population chrétienne locale.
Ces revendications marquent la fin de la première phase des actions de l'Empire ottoman en Transcaucasie et le début de la seconde. La prise facile de Kars et de Batum convainc Enver Pacha qu'il peut réitérer son offensive pan-turque de 1914. Les deux principaux objectifs des Turcs sont la prise de Bakou et l'occupation de l'Azerbaïdjan caucasien et iranien. Dans le contexte de l'effondrement continu de la Russie, des plans plus audacieux sont proposés : invasion de la Transcaspienne et du Turkestan, organisation d'une révolte panislamique contre les Britanniques en Afghanistan, dans le sud de l'Iran et dans le nord de l'Inde.
L'Arménie et la Géorgie, dont les territoires sont traversés par d'importantes voies de communication, sont les seuls obstacles. Il n'est pas difficile pour l'armée de Vehyp Pacha de briser la résistance de ces États, mais des troupes supplémentaires sont nécessaires, car les Britanniques ne resteront pas indifférents au sort de Bakou et du nord de l'Iran. La réaction du gouvernement soviétique aux événements n'était pas non plus exclue. Malgré la position précaire des troupes turques en Palestine, la 15e division d'infanterie, en provenance du front roumain, est arrêtée au Bosphore pour être transportée par mer jusqu'à Batum. Plus que de soldats, Enver Pacha avait besoin de commandants qui comprenaient ses objectifs et pouvaient les atteindre. Son demi-frère, Nuri Pacha, est appelé de Tripolitaine, où il a résisté avec succès aux Italiens, et son oncle Halil Pacha est nommé commandant du groupe d'armées Est, qui combine les 3e et 6e armées opérant dans le Caucase et en Mésopotamie et le groupe d'armées Kars.
L'Allemagne, alliée de la Turquie, n'approuve pas les plans pan-turcs d'Enver Pacha, car elle a ses propres plans pour Bakou et la Géorgie. Des troupes allemandes sont introduites dans cette dernière pour empêcher une offensive turque. Mais la situation est différente pour les Arméniens. Les Allemands ne s'intéressent pas à la défense de l'Arménie et encouragent même une offensive turque sur l'Iran à travers l'Arménie, ce qui pourrait arrêter les actions britanniques en direction de Bakou. Avec l'espoir fantomatique d'une aide britannique, les Arméniens n'ont d'autre choix que de résister à l'armée turque. De plus, les Arméniens craignaient que l'offensive turque n'entraîne des soulèvements spontanés de la population musulmane d'Arménie. Face à l'inévitable invasion turque et à la perspective d'un conflit interethnique à l'arrière, les Arméniens réalisent que même la capitulation ne fera que retarder la destruction effective du peuple arménien. En mai 1918, la victoire des puissances occidentales dans la guerre semble pour le moins incertaine aux yeux des observateurs arméniens. Pendant ce temps, les Turcs sont pressés de réaliser leurs plans grandioses et, alors que les négociations et l'armistice sont encore à l'ordre du jour, les troupes turques traversent l'Arpachay.
Traitée de Brest-Litovsk et la récupération de territoires
[modifier | modifier le code]Le traité de Brest-Litovsk a offert à Enver Pacha et aux Ottomans une occasion en or de récupérer des territoires clés en Transcaucasie qui étaient auparavant sous contrôle russe. Selon les termes du traité, la Russie abandonna la Pologne, l'Ukraine, les Pays baltes, la Finlande, et accepta également de céder des territoires en Biélorussie. Plus pertinent pour l'Empire ottoman, le traité prévoyait la rétrocession des provinces de Kars, Ardahan et Batoum, des régions stratégiques qui suscitaient l'intérêt de la Turquie en raison de leur population musulmane et de leur géopolitique. Enver Pacha saisit cette occasion pour mettre en œuvre son plan de libération des terres irrédentes et d'occupation de la Transcaucasie. Les Ottomans lancèrent une offensive dès que le traaité fut signé, poussant le Commissariat transcaucasien à se retrouver face à une décision difficile : accepter les termes du traité de Brest-Litovsk et céder les territoires désignés ou engager un effrontement militaire avec l'Empire ottoman[11].
Forces des partis
[modifier | modifier le code]Le 15 mai 1918, l'Empire ottoman dispose de 9 divisions d'infanterie bien équipées pour une offensive en Transcaucasie, soit environ 55 à 60 000 soldats.
Les 37e et 5e divisions caucasiennes du IIe corps de l'armée du Caucase, stationnées à Batum et Oltu.
Les 36e et 9e divisions du Caucase du 1er corps de l'armée du Caucase, stationnées entre Kars et Alexandropol.
La 10e division du 1er corps de l'armée du Caucase à Ardahan.
La 11e division du IIe corps de l'armée du Caucase en réserve à Kars.
Autour de Diyadin et Bayazit avec une patrouille dans les cols d'Agra Dag, la 12e division du IVe corps d'armée.
En marche de Van vers Bashkal et la frontière iranienne, la 5e division d'infanterie du IVe corps d'armée.
en attendant le transport d'Istanbul à Batum, la 15e division.
En outre, plusieurs milliers de miliciens sont utiles dans les opérations de montagne pour saboter et saper les lignes de communication
Cependant, en raison de complications dans les plans turcs, seules 5 divisions sur 9 (30 000 hommes) ont pu participer à l'offensive transcaucasienne. Ainsi, la disparité des forces entre les Turcs et les Arméniens n'est pas très grande[11].
Face aux Turcs, les Arméniens peuvent opposer 20 000 soldats, en outre, le commandement arménien dispose d'une cavalerie de 1 000 hommes, divisée en deux régiments, et de plus de 50 canons de campagne.
La plupart des troupes arméniennes étaient des volontaires ayant l'expérience de la guerre irrégulière et une excellente connaissance du terrain où la bataille devait se dérouler, ce qui aurait dû persuader les commandants arméniens d'utiliser le style de guerre de la guérilla. Par guérilla, il faut entendre non pas la guerre des Gwerillas, menée par de petits groupes de soldats qui se dispersent et se rassemblent, mais la guerre menée par des régiments mobiles et compacts de 500 à 1 500 hommes équipés de fusils de campagne et de mitrailleuses. Le territoire arménien est propice à la guérilla : les deux voies ferrées et les routes principales, que les Turcs doivent défendre avant de poursuivre leur offensive sur Bakou, longent des vallées entourées de grandes chaînes de montagnes, faciles à défendre par de petits groupes actifs et abritant en même temps les paysans arméniens et leur bétail dans les plaines. Pour ce type de guerre, les Arméniens disposaient d'excellents chefs militaires tels qu'Andranik, Dro et Amazasp. La stratégie de la guérilla ne pouvait pas empêcher les Turcs de s'emparer des principales lignes de communication, mais elle pouvait rendre leur utilisation prolongée difficile et dangereuse. En outre, la stratégie de guérilla correspondait aux besoins politiques de la situation arménienne, car elle permettait d'abriter une grande partie de la population paysanne arménienne dans des zones difficiles à capturer, en attendant des changements dans la politique internationale.
La guérilla aurait pu poser de grandes difficultés à l'armée turque au cours de l'été 1918. Mais le problème est que, tandis que le Conseil national arménien poursuit ses expériences politiques, les commandants militaires arméniens persistent dans l'illusion qu'ils commandent une armée nationale régulière et pensent qu'ils doivent manœuvrer selon les règles de la guerre régulière.
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Déroulement de la guerre
[modifier | modifier le code]Les Arméniens, qui attendent toujours les résultats des négociations de Batum, sont surpris par le début soudain de la deuxième phase de l'offensive transcaucasienne de l'armée turque. Dans la nuit du 14 au 15 mai, lors d'une conférence de paix, les Turcs lancent un ultimatum pour évacuer Alexandropol dans les 24 heures et faire reculer les troupes arméniennes sur une ligne située à 40 kilomètres de la ville. Sans attendre de réponse, le 15 mai à l'aube, les troupes turques traversent l'Arpachay et commencent leur offensive en direction de la route Tiflis-Alexandropol. Les troupes arméniennes entament une retraite précipitée d'Alexandropol vers Dilijan. Une grande quantité de munitions est laissée à l'ennemi[11].
Le quartier général du général Nazarbekov se trouve à Karakilis, une ville située à 56 kilomètres d'Alexandropol, où passent la route de Dilijan et la voie ferrée de Tiflis. Il donne les ordres suivants
La 1re division de fusiliers (12 bataillons) et le 8e régiment de fusiliers (6 bataillons) tiennent la ligne à l'ouest de la gare d'Amamli, où une partie de l'autoroute bifurque vers le sud d'Erivan.
Les régiments de volontaires d'Erzerum, Erzinjan, Hinisi et Karakilis (8 bataillons) et 2 régiments de cavalerie (1 000 sabres) se déplacent vers le sud le long de l'autoroute jusqu'à Erivan pour renforcer le groupe basé à Erivan.
Les régiments de volontaires de Lori et d'Akhalkalaki (4 bataillons) dirigés par Andranik tiennent une position près de Gullu-bulak, où la route Alexandropol-Tiflis bifurque vers Tiflis et Akhalkalaki.
Erivan étant la capitale de l'Arménie, l'envoi de renforts dans cette direction était politiquement inévitable ; et les troupes principales à Amamli avaient toujours la possibilité de faire la jonction avec le groupe d'Erivan via la route Dilijan-Erivan. Le groupe de flanc d'Andranik à Gullu-bulak était une bonne idée, mais ces troupes étaient trop faibles pour être efficaces dans des opérations régulières.
À Alexandropol, les Turcs contrôlent un important nœud ferroviaire où la ligne de Sarykamysh et de Kars rejoint la ligne principale Tiflis-Julfa. Cependant, il était important de repousser les forces arméniennes en possession du carrefour routier d'Amamli, qui contrôlait une route alternative vers Erivan et Echmiadzin en contournant le massif d'Alagöz. Les Turcs décident également de frapper le groupe de flancs d'Andranik par l'embranchement routier vers Akhalkalaki et Tiflis.
La 5e division du Caucase lance une offensive contre Andranik, tandis que la 36e et certaines parties de la 9e sont engagées contre la ligne arménienne devant Amamli. Les 21 et 22 mai, les Turcs, beaucoup plus forts que les Arméniens en infanterie, repoussent facilement les principales forces de Nazarbekov. Le commandant arménien décide de concentrer ses troupes à Karakilis et d'y résister jusqu'à la mort. Le 24 mai, l'un de ses détachements parvient même à contre-attaquer et à repousser l'avant-garde turque jusqu'à Amamli[11].
Entre-temps, le 19 mai, la 5e Division du Caucase s'empare de Gullu-bulak puis du col de Karakhach sur la route Alexandropol-Tiflis. Andranik se replie sur Vorontsovka, poursuivi par les Turcs. De Vorontsovka, il se tourne vers le sud-est, en direction de Karakilis, car il craint d'être coupé du gros des forces. Les 22 et 23 mai, les forces d'Andranik combattent à Jalal-oglu, puis se replient sur la gare de Dseh (à 40 km de Karakilis).
Pendant ce temps, près d'Erivan, le général Silikov mène sa propre campagne militaire. Le 15 mai, il concentre ses troupes principales (6 000 à 7 000 hommes) à Echmiadzin et Sardarapat. Il dispose également d'une forte patrouille au sud de la rivière Arax, dans la région d'Iğdır-Karakale, qui est en contact avec les avant-postes de l'avant-garde turque qui s'est emparée de Diyadin, de Bayazet et des cols de l'Agri-Dagh. Les 1er et 2e régiments de Van et un régiment de cavalerie sont concentrés sur la rive nord de l'Araxe pour défendre les ponts de Markar et de Karakale. En outre, 1 000 fantassins lourdement armés sous le commandement de Dro sont envoyés à Bash Aparan.
Les 18 et 19 mai, les Turcs lancent une offensive à partir du sud de l'Araxe. La 12e division se déploie à Ağrı Dagh, positionnant son flanc gauche vers Karakale et son flanc droit vers Khalfali près d'Iğdır. Au même moment, des milices kurdes apparaissent sur la rive nord de l'Araxe, près de Nakhitchevan. Le 20 mai, des unités de la 12e division d'infanterie prennent Igdir[11].
Du 21 au 29 mai ont lieu les batailles de Sardarapat et de Bash Aparan, dans lesquelles les Arméniens sont victorieux empêchant l'armée ottomane d'atteindre Erevan.
Dans le nord, les principales forces arméniennes sous le commandement de nazarbekian lors de la bataille de Karakilis, qui se déroule du 26 au 28 mai[13]. Vehyp Pacha note que « ... tant qu'ils [les Arméniens] sont menacés, ils préfèrent mourir au combat ».
Nazarbekov a besoin de renforts et Silikov doit envoyer les deux régiments de Van au village de Semenovka sur la route Erevan-Dilijan. Il rassemble les troupes restantes, à l'exception du régiment de Dro, à Sardarapat et au pont de Markara.
C'est dans cette position que le traité de paix signé à Batum le 4 juin est respecté.
Conséquences
[modifier | modifier le code]La 12e division d'infanterie turque, qui, pour des raisons inconnues, était restée inactive lors des derniers combats, franchit l'Araxe à Karakale et rejoint la 11e division caucasienne. Entre le 7 et le 9 juin, les affrontements se poursuivent entre les Ottomans et les unités de volontaires arméniens qui refusent de reconnaître le traité de paix. Les Turcs prennent le contrôle de la voie ferrée de Julfa près des gares de Sardarapat, Echmiadzin et Ulukhanlu. Dans le même temps, ils s'abstiennent de prendre la ligne de chemin de fer d'Erivan. La Première République d'Arménie, proclamée le 28 mai 1918, est contrainte d'accepter les conditions difficiles de l'Empire ottoman à Batum. Le territoire de l'Arménie est limité à 10 000 kilomètres carrés, soit moins de la moitié de la province d'Erivan. Le 2 juin, à la nouvelle des victoires des forces arméniennes dans les environs d'Erivan, la délégation ottomane, « au nom des relations amicales », alloue 1 000 kilomètres carrés supplémentaires à l'Arménie. Batoumi Le traité de paix et d'amitié, signé le 4 juin, laisse à l'Arménie le district de New Bayazet et les parties orientales des districts d'Alexandropol, d'Erivan, d'Echmiadzin et de Sharur-Daralaghez. En outre, l'Arménie est tenue de garantir les droits religieux et culturels des musulmans locaux, de réduire considérablement son armée, d'expulser tous les représentants des pays hostiles aux Puissances centrales et de garantir le passage sans entrave des troupes et des fournitures ottomanes sur le territoire de la République. Si l'Arménie violait l'une de ces obligations, l'Empire ottoman était autorisé à intervenir. L'échange des traités ratifiés devait avoir lieu un mois plus tard à Constantinople. L'Azerbaïdjan et la Géorgie signent également des traités avec l'Empire ottoman le même jour, mais les conditions imposées à la Géorgie ne sont pas aussi sévères et le document azerbaïdjanais-ottoman est plus conforme aux principes de l'union.
Le général Andranik, qui traite la République d'Arménie comme un otage turc et considère le traité de Batoumi comme un diktat, arrive à Zangezur avec une milice de trois à cinq mille hommes, suivie par plusieurs milliers de réfugiés arméniens de l'Empire ottoman. Les chefs arméniens locaux soutiennent Andranik. Andranik commence à détruire les villages musulmans et à massacrer la population azerbaïdjanaise . Les destructions d'Andranik provoquent la protestation de Khalil Pacha à Erivan, qui menace le gouvernement arménien de représailles. En réponse, le Premier ministre Kajaznuni déclare qu'il n'a aucune autorité sur les guérilleros et rappelle à Khalil Pacha que Nuri Pacha a proclamé toute la province de Yelizavetpol comme territoire azerbaïdjanais et a interdit aux troupes arméniennes de se trouver à Zangezur, de sorte que l'Arménie n'est pas responsable des événements de Zangezur.
Quelques mois plus tard, en novembre 1918, la défaite des pays de la Quatrième Alliance dans la Première Guerre mondiale oblige les Turcs à revenir aux frontières de 1914 et permet à l'Arménie non seulement de regagner les territoires perdus, mais aussi d'inclure la province de Kars.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ (en) Edward J. Erickson, The Turkish War of Independence: A Military History, 1919–1923, ABC-CLIO, (ISBN 978-1-4408-7842-8, lire en ligne) :
« Treaty of Batum (1918) were particularly severe on the defeated Armenians. »
- ↑ (en) Richard G. Hovannisian, The Republic of Armenia: The first year, 1918-1919, University of California Press, (ISBN 978-0-520-01805-1, lire en ligne), p. 30 :
« the valiant efforts of the Armenians, who, however, had now been defeated. »
- ↑ (en) Hayden Herrera, Arshile Gorky: His Life and Work, Farrar, Straus and Giroux, (ISBN 978-1-4668-1708-1, lire en ligne)
- ↑ (Minassian 2006, p. 57) « La fin de l'Arménie turque »
- ↑ (Minassian 2006, p. 54) « La première dirigée par le général Kazim Karabékir a pour première objectif Kars en passant par Erzurum »
- ↑ (Minassian 2006, p. 54) « La seconde, sous les ordres de Chévki Pacha doit opérer le long de l'axe Trébizonde-Batoum. »
- ↑ (Minassian 2006, p. 54) « La troisième commandée par Ali Ishan Pacha doit atteindre Van, Bayazid et le nord de l'Azerbaïdjan »
- ↑ (en) Stephen Pope et Elizabeth-Anne Wheal, Dictionary of the First World War, Pen and Sword, (ISBN 978-0-85052-979-1, lire en ligne)
- ↑ (en) Jonathan Spurrell, Laurie Holmes, Michael Green et Nicole Wright, None Have Done Better: The lives of the Old Colcestrians who died in the First World War, Paragon Publishing, (ISBN 978-1-78222-618-5, lire en ligne)
- ↑ Décris par Minassian dans la page 56, « sans exagération, considérer comme une guerre arméno-turque. »
- ↑ (Minassian 2006, p. 54-55)
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Anahide Ter Minassian, 1918-1920, la République d'Arménie, Editions Complexe, (ISBN 978-2-8048-0092-5, lire en ligne)
- (en) David Bilton, The Central Powers on the Russian Front 1914–1918, Pen and Sword, (ISBN 978-1-4738-3453-8, lire en ligne)
- (en) Mesut Uyar, The Ottoman Army and the First World War, Routledge, (ISBN 978-1-000-29518-4, lire en ligne)