Guerre du Sud — Wikipédia


La guerre du Sud est une guerre civile qui, de juin 1799 à août 1800, opposa deux chefs républicains de la révolution haïtienne, le Noir Toussaint Louverture, qui contrôlait les départements Nord et Ouest de Saint-Domingue, et le mulâtre André Rigaud, qui contrôlait le Sud.
Contexte politique
[modifier | modifier le code]En août 1798, Toussaint Louverture obtient la reddition des Britanniques occupant encore l’Ouest de l’île. L’accord signé entre les deux parties prévoit notamment l’ouverture des ports de Saint-Domingue aux navires de commerce britanniques, alors même que la France est encore en guerre contre la Grande-Bretagne[1]. Le général Hédouville, supérieur hiérarchique de Toussaint en poste depuis , furieux d’une telle insubordination, s’émeut plus encore par le contenu de l’accord. La dégradation de leur relation est telle que Toussaint organise, en , une révolte populaire forçant Hédouville à quitter l’île. La veille de son départ forcé, Hédouville décharge le général André Rigaud contrôlant le Sud de l’île, de toute sujétion à l’égard de Toussaint Louverture.
La guerre du Sud
[modifier | modifier le code]En juin 1799, la guerre éclate entre Toussaint Louverture, général en chef des armées républicaines à Saint-Domingue, et le général André Rigaud, commandant militaire du Sud.
Les principaux commandants militaires de Toussaint Louverture sont les généraux Moyse, Jean-Jacques Dessalines et Henry Christophe. Au plus fort du conflit, l'armée louverturienne comptera environ 20 000 hommes [2].
André Rigaud, lui, dispose d'environ 4 000 hommes dans la Légion de l'égalité du Sud [2]. De nombreux officiers mulâtres comme Guy-Joseph Bonnet et Alexandre Pétion se rangent de son côté, mais aussi des officiers noirs comme Lubin Golart [3], le colonel Barthélémy et le général Pierre Michel [4]. Il reçoit aussi le soutien d'un chef marron hostile à Toussaint, Lamour Dérance.
La guerre du Sud pourrait être vue comme un conflit entre la « caste » des Noirs (représentés par Toussaint) et la « caste » des mulâtres (représentés par Rigaud), mais il s'agit surtout d'une lutte pour le pouvoir et le contrôle du territoire[5]. Il n’empêche que la direction louverturienne mènera des persécutions sanglantes contre les Mulâtres dans tout Saint-Domingue, et en particulier au Sud.
Au total, la guerre du Sud aurait fait au moins 5 000 victimes civiles et militaires [6].
En , après la prise de Jacmel par les troupes de Toussaint Louverture, la défense du Sud s'écroule peu à peu. En août 1800, André Rigaud s'embarque pour la France et ne reviendra à Saint-Domingue que deux ans plus tard, avec l'expédition Leclerc.
Ne pas confondre avec la « guerre-couteaux »
[modifier | modifier le code]La guerre du Sud ne doit pas être confondue avec les appellations populaires « guerre-couteaux », « guerre des couteaux », ou « guerre aux couteaux ». Celles-ci correspondent à des massacres à l'arme blanche dont le souvenir était encore vif dans les mémoires haïtiennes des années 1820-1830.
Ainsi l'historien Joseph Saint-Rémy raconte que l'épisode de terreur mené par la direction louverturienne à l'issue de la guerre du Sud, au second semestre 1800, avait été surnommé « guerre des couteaux » par les habitants du Sud[7].
Le diplomate français Gaspard Théodore Mollien, en poste à Haïti en 1825-1831, rapporte qu'on avait surnommé « guerre aux couteaux » la révolte du Nord d'octobre 1801, qui avait vu l'assassinat de plusieurs centaines de Blancs [8].
Pour les historiens Thomas Madiou et Beaubrun Ardouin, enfin, c'est la répression de cette même révolte du Nord qui avait été surnommée « guerre-couteaux », parce que plusieurs centaines de cultivateurs et cultivatrices noirs avaient été tués à la baïonnette par les troupes louverturiennes[9],[10].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ Frédéric Régent, op. cit., p. 257[réf. non conforme]
- Sabine Manigat "Guerre du Sud", in Dictionnaire historique de la Révolution haïtienne, Cidihca, 2014, page 136.
- ↑ Beaubrun Ardouin, Études sur l'histoire d'Haïti, t. IV, Paris, Chez l'auteur, (lire en ligne), p. 104
- ↑ Beaubrun Ardouin, Études sur l'histoire d'Haïti, t. IV, Paris, Chez l'auteur, (lire en ligne), p. 105
- ↑ Frédéric Régent, op. cit., p. 256
- ↑ François Roc, Dictionnaire de la Révolution Haïtienne, Montréal, Guildives, (ISBN 9782980969003), « Guerre du Sud », p. 236
- ↑ Joseph Saint-Rémy, Vie de Toussaint-L'Ouverture, Paris, Moquet, , 428 p. (lire en ligne), p. 289
- ↑ Gaspard Théodore Mollien (préf. Francis Arzalier), Haïti ou Saint-Domingue, t. II, Paris, L'Harmattan, , 164 p. (ISBN 2-296-01076-8, lire en ligne), p. 98
- ↑ Thomas Madiou, Histoire d'Haïti, t. II, Port-au-Prince, Imprimerie Courtois, (lire en ligne), p. 123
- ↑ Beaubrun Ardouin, Étude sur l’histoire d’Haïti, t. VI, Paris, Chez l'auteur, (lire en ligne), p. 426
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Franck Laraque, « L’incessante lutte des masses haïtiennes pour la liberté et leur existence », sur le site de la revue trilingue haïtienne d’études politiques et littéraires, Tambour.