Jeanne Labourbe — Wikipédia
Naissance | |
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Décès | (à 41 ans) Odessa |
Sépulture | Second cimetière chrétien d'Odessa (d) |
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Jeanne Marie Labourbe (1877 - 1919) est une militante bolchévique française qui a participé activement à la Révolution d'Octobre. Elle meurt en à Odessa, exécutée par la police locale aux ordres des Russes blancs.
Biographie
[modifier | modifier le code]Jeanne Labourbe naît à Lapalisse, une petite ville du sud-est de l'Allier où elle travaille très tôt dans une blanchisserie. Fille de Claude Labourbe, ouvrier terrassier, et de Marie Labbé, journalière, elle est le troisième enfant d'une fratrie de cinq membres. Depuis le sanglant soulèvement de La Palisse[1] contre le coup d'État du 2 décembre 1851 fomenté par le prince-président Louis-Napoléon Bonaparte, un fort sentiment de républicanisme et de justice sociale s'était profondément enraciné dans le pays. L'incroyable engagement politique de son compatriote Louis-Simon Dereure, qui fut l'un des leader de la 1re Association internationale des travailleurs et membre de la Commune de Paris, inspira t-il la trajectoire idéologique hors norme de l'humble repasseuse ?
En 1896, à l'âge de 19 ans, Jeanne repère une offre d'emploi pour être lectrice de français en Pologne, qui fait alors partie de l'Empire russe. Elle décide d'y partir et est embauchée comme gouvernante et lectrice de français au sein d'une famille de la bourgeoisie polonaise de Tomaszów Mazowiecki.
Après plusieurs années, elle devient institutrice et adhère au Parti ouvrier social-démocrate de Russie au moment de la Révolution de 1905. En 1917, elle participe de façon active à la Révolution d'Octobre et fonde le le 1er Groupe communiste français de Moscou aux côtés de Jacques Sadoul, de Pierre Pascal et d'Inès Armand.
Soutien aux idéaux des contre-révolutionnaires russes, la France, par décision de Georges Clemenceau alors président du Conseil, fait envoyer courant 1918 au port d'Odessa une escadre de sa flotte maritime afin de réprimer militairement la propagation des mutineries de la mer Noire.
Lorsqu'elle apprend le débarquement, le , des troupes françaises à Odessa, Jeanne Labourbe se porte volontaire pour rejoindre la ville portuaire afin d'y mener une politique de propagande et de défense de la révolution bolchévique en direction des marins et soldats français[2]. Elle y fait notamment paraître le bulletin Le Communiste, rédigé en français. Mais la ville d'Odessa était déjà tombée sous le contrôle des Russes blancs.
Dans la nuit du 1er au , selon le récit d'un témoin, Radkov, qui réussit à s'échapper, Jeanne Labourbe est arrêtée par des militaires russes et français dans son appartement, avec plusieurs autres personnes présentes. L'appartement est mis à sac, ses occupants, plusieurs de ses camarades du groupe communiste français à Moscou, emmenés à la Sûreté militaire, torturés puis traînés jusqu'au cimetière juif pour y être abattus à coups de revolver[3]. Aussitôt connue, cette tragique exécution fit l'objet dans la Pravda de la parution suivante :
« Le Groupe Communiste Français, fait part aux camarades de la mort tragique de sa secrétaire JEANNE LABOURBE, fusillée le 2 mars à Odessa par les mercenaires du commandement français. Gloire éternelle à la camarade tombée courageusement à son poste révolutionnaire. »
Au cours des années 1920, les raisons de l'atrocité de l'assassinat politique subi par la militante Jeanne Labourbe restèrent très troubles et furent intentionnellement occultées par la contre-propagande officielle française. Dans un article nécrologique paru dans la Pravda du , on pouvait lire sous la plume du camarade russe Niourine, qui fut l'un des témoins du drame, la cinglante diatribe suivante :
« Le prolétariat français immortalisera ce nom honoré de la première communiste française qui sut lutter pour la révolution. »
Après seize mois passés dans l'URSS, l'écrivain franco-roumain Panaït Istrati, surnommé le Gorki des Balkans, revenu complètement désillusionné du régime communiste et soviétique mis en place et irrémédiablement brouillé avec Romain Rolland, écrivit fin 1929 dans un ouvrage politique emblématique et intitulé Vers l'Autre Flamme, ces quelques lignes particulièrement révélatrices :
« Je dois à un ouvrier roumain l'horrible récit de l'assassinat par les troupes blanches de l'institutrice française Jeanne Labourbe, crime, entre mille autres, dont le prolétariat et les instituteurs français doivent un jour demander compte aux impérialistes de leur pays. »
Hommages
[modifier | modifier le code]Plusieurs villes françaises ont donné le nom de Jeanne Labourbe à une rue ou une école : Lapalisse, Saint-Pierre-des-Corps, Fleury-les-Aubrais, Vierzon, Varennes-Vauzelles (Nièvre), Saint-Martin-d'Hères, Tremblay-en-France, Lanester (Morbihan), Montluçon, Fontaine (Isère), Saran, Vénissieux, Saint-Vallier (Saône-et-Loire), Juvisy-sur-Orge, Montataire, etc.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Lapalisse (Allier) est une des rares communes de France, possédant un Monument dédié aux victimes du coup d'État de 1851.
- Marcel Body, Un ouvrier limousin au cœur de la révolution russe, éditions Spartacus, 1986, page 88.
- Francois Bonnet, Médiapart et Collectif, Des vies en révolution : Ces destins saisis par Octobre-17, Paris, Don Quichotte, , 182 p. (ISBN 9782359496529, lire en ligne).
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Lénine, La Révolution bolchévique. Ecrits et Discours de Lénine de 1917 à 1923. Edition Maspéro. Paris 1931.
- John Reed, Dix jours qui ébranlèrent le monde, Éditions Boni & Liveright, New York, 1919.
- Louise Bodin, « Jeanne Laborde (J. Labourbe) », L'Humanité, 11 juillet 1919 et 26 avril 1920.
- Jean Fréville, « Une révolutionnaire française de la Révolution russe : Jeanne Labourbe », Cahiers de l'Institut Maurice Thorez, no 13, 1er trimestre 1969.
- Annie Kriegel, Aux origines du communisme français : contribution à l'histoire du mouvement français, Paris, Flammarion, 1970.
- Alfred Rosmer, Moscou sous Lénine : les origines du communisme, Paris, F. Maspero, 1970.
- Roland Gaucher, Histoire secrète du Parti Communiste Français, 1920-1974, Paris, Albin Michel, 1974.
- (ru) Aleksandr Michjlovic Dunaevski, Zanna Ljaburb Zmakomaja i neznakomaja, Ed. Moskva. Politizdat. 1976, 165 p.
- Ludmila Zak, Des Français dans la Révolution d'Octobre, préface de Georges Cogniot, traduction du russe par Claudie Bassi, Paris, Éditions sociales, 1976. Cet ouvrage est principalement consacré à la mémoire de Jeanne Labourbe.
- (hr) Aleksandar Dunajevski, Smrt revolucionarke Jeanne Labourbe, Zagreb, Alfa, 1978.
- Pierre Pascal, En Communisme : mon journal de Russie. 1918-1921, t. II, L'Âge d'homme, 1977.
- Jacques Raphaël-Leygues et Jacques Barré, Les mutins de la mer noire - , des marins français se révoltent, Paris, Plon, 1981.
- Philippe Masson, La marine et la mer Noire 1918-1919, Éditions de la Sorbonne, 1982.
- Marcel Body, Les groupes communistes français de Russie 1918-1922, Paris, Allia, 1988. Réédition 2015.
- Franz Van der Motte, Jeanne Labourbe, première communiste française, héroïne de la Révolution d'Octobre, Paris, Les Points sur les I, 2015.
- Antoine Perraud, Octobre 17. Jeanne Labourbe, l’institutrice française tuée à Odessa, sur Mediapart, le (lire en ligne).
- François Bonnet, Des vies en Révolution, ces destins saisis par Octobre 17, postface de Marc Ferro, Mediapart. Don Quichotte Editions, 2017.
- Bernard Lecomte, Histoire du communisme pour les nuls (Un portrait : Jeanne Labourbe), Paris, First, Paris, 2017.
- Jean Maitron, « Notice LABOURBE Jeanne (LABOURBE Marie dite Jeanne) », version mise en ligne le , dernière modification le .