Les Perses — Wikipédia
Les Perses | |
L'Ombre de Darius apparaît devant la Reine | |
Auteur | Eschyle |
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Genre | tragédie grecque |
Date d'écriture | 472 av. J.-C. |
Personnages principaux | |
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Les Perses (en grec ancien Πέρσαι / Persai) est une tragédie d'Eschyle jouée en 472 av. J.-C. au théâtre de Dionysos, sur les flancs de l'Acropole à Athènes.
La didascalie des Perses nous apprend que la pièce est la deuxième d'une tétralogie : les Perses étaient précédés d'un Phinée et étaient suivis d'un Glaucos de Potnies ; la trilogie tragique était elle-même suivie d'un Prométhée, drame satyrique[1]. Son chorège fut Périclès.
Les Perses est la plus ancienne pièce de l'histoire du théâtre dont on ait conservé le texte[2],[N 1], même si l'on a longtemps pensé qu'il s'agissait des Suppliantes (hypothèse invalidée depuis la publication du Papyrus d'Oxyrhynque 2256.3 en 1952, qui a permis de corriger la date des Suppliantes).
La pièce contient le plus ancien récit conservé de la bataille de Salamine[3],[N 2].
Genèse et histoire
[modifier | modifier le code]Cette tragédie fut écrite après les victoires grecques de Salamine et de Platées (Eschyle ayant participé à la première). Si ces échecs militaires n'atteignaient pas réellement l'Empire perse, l'année 480 av. J.-C. fut vécue par les Grecs comme la victoire d'un peuple moins nombreux, mais libre, contre un grand empire ; ou encore du monde hellénique contre les « barbares ». Sans doute, d'un point de vue historique, ce tableau paraît il simplifié : certains peuples grecs avaient pactisé avec l'Empire perse, lequel n'avait rien de sauvage ; les échanges entre les deux civilisations étaient constants. Mais l'orgueil des Grecs, surtout celui des Athéniens, exalté par le rôle qu'avait joué leur cité, trouvait là matière à un enthousiasme que la poésie allait pouvoir magnifier.
Résumé
[modifier | modifier le code]La pièce a lieu à Suse, la capitale de l'Empire perse, et s'ouvre sur un chœur de vieillards, bientôt rejoints par la Reine, mère du roi Xerxès. Tous attendent anxieusement des nouvelles de l'expédition de Xerxès contre les Grecs. Un messager arrive et annonce la défaite des Perses à Salamine, listant de nombreux généraux morts au combat. Il fait savoir que Xerxès est vivant et sur le chemin du retour. La Reine se rend à la tombe de son défunt mari Darius et invoque son Ombre. À la nouvelle de la défaite, Darius condamne l'hybris de son fils Xerxès qui l'a poussé à attaquer la Grèce. Avant de s'évanouir, l'Ombre de Darius prophétise une autre défaite à venir, celle de Platées. Xerxès arrive finalement, encore sous le choc de sa défaite cuisante. La pièce se conclut par des lamentations de Xerxès et du chœur.
Plan
[modifier | modifier le code]Les Perses ne comportent pas de prologue[5],[6] : le chœur entre en scène au début même de la pièce qui s'ouvre sur un chant du coryphée en dimètres anapestiques[7].
Le plan de la pièce est le suivant :
- parodos : partie anapestique ; partie lyrique ; conclusion anapestique
- premier épisode : la reine, le chœur ; le Messager : récit et kommos (lamentation)
- intermède choral
- deuxième épisode : la reine, le chœur
- intermède choral
- troisième épisode : l'ombre de Darius, la reine puis le chœur
- intermède choral
- exodos lyrique : le chœur, Xerxès.
Personnages
[modifier | modifier le code]Les trois personnages principaux sont, par ordre d'entrée en scène, la Reine, Darius et Xerxès[3].
La Reine n'est jamais nommée[3]. Le nom de Darius apparaît seize fois dans la pièce : treize fois sous la forme Daréios ; les trois autres sous la forme Darian[8]. Xerxès est ainsi nommé dix-sept fois dans la pièce[9].
Analyse
[modifier | modifier le code]Le drame, dans les Perses, ne repose pas sur l'agencement des péripéties et des événements ; ceux-ci sont déjà passés, et on les raconte, ou à venir, et on les prédit ; au reste, le spectateur les connaît déjà et toute l'émotion réside en l'attente angoissée de la catastrophe. Nulle œuvre, à part peut-être les Sept contre Thèbes, ne reflète mieux l'union des deux éléments constitutifs de la tragédie grecque : la déploration lyrique et la narration épique[non neutre] ; le récit du messager d'une part, la prophétie de Darius de l'autre sont les points culminants qui émergent du crescendo choral. Le songe d'Atossa, reine et mère de Xerxès, et son dialogue avec le chœur préparent l'arrivée du messager. Ainsi l'émotion dramatique est obtenue non par un agencement des péripéties, mais par la création d'un climat continu d'attente et d'angoisse, se résolvant en une déploration du malheur consommé.
Adaptations et mises en scène notables
[modifier | modifier le code]Antiquité
[modifier | modifier le code]D'après un appendice à la Vie d'Eschyle[10] :
« Hiéron fit à Eschyle l'honneur de donner une nouvelle représentation des Perses en Sicile, où il fut grandement admiré. »
D'après le scholiaste des Grenouilles d'Aristophane, cette affirmation provient d'Ératosthène[10]. Hiéron est identifié à Hiéron Ier, deuxième tyran de Syracuse[11]. La représentation aurait eu lieu en -470 et Eschyle aurait composé, à cette occasion, la tragédie des Aitnéennes (ou Etnéennes)[12],[13].
Histoire contemporaine
[modifier | modifier le code]Une adaptation française en téléfilm, ou plutôt en « théâtre filmé » nommé Les Perses est sorti en 1961 et est adaptée par Jean Prat pour la télévision[14].
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Le théâtre sanskrit apparaît au Ier siècle ; le théâtre chinois, au XIIIe ; et le théâtre japonais, au XIVe avec le nô[2].
- v. 353-471[4].
Références
[modifier | modifier le code]- Deforge 1987, p. 30.
- Scherer 1994, p. 127.
- Tourraix 1984, p. 124.
- Tourraix 1984, p. 124, n. 1.
- Bordeaux 2000, p. 6, n. 6.
- Irigoin 1982, p. 173.
- Aygon 2004, p. 294.
- Tourraix 1984, p. 127.
- Tourraix 1984, p. 131.
- Taplin 2007, § 15.
- Taplin 2007, § 3.
- Édouard Will, Le Monde grec et l'Orient, Le Ve siècle (510-403), PUF, 1972, p. 244-245.
- Eschyle, tome 1, éditions Les Belles Lettres, 1966, Introduction p. IV.
- « Les Perses | Archive INA » (consulté le )
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- [Aygon 2004] Jean-Pierre Aygon, Pictor in fabula : l'ecphrasis-descriptio dans les tragédies de Sénèque, Bruxelles, Latomus (no 280), , 1re éd., 1 vol., 534, 16 × 24 cm (ISBN 2-87031-221-0, EAN 9782870312216, OCLC 298595226, BNF 41047236, SUDOC 081276958, lire en ligne).
- [Bordeaux 2000] Lucien Bordaux, « Les Perses : de l'Histoire aux mythes », Littératures, no 43, , p. 5-19 (DOI 10.3406/litts.2000.2135, lire en ligne).
- [Deforge 1987] Bernard Deforge, « Eschyle et la légende des Argonautes », Revue des études grecques, t. C, nos 475-476, , p. 30-44 (OCLC 7787924616, DOI 10.3406/reg.1987.1487, JSTOR 44263932, lire en ligne).
- [Irigoin 1982] Jean Irigoin, « La parodos des Perses d'Eschyle : analyse métrique et établissement du texte », dans Mario Naldini (éd.), Studi in onore di Aristide Colonna [« Études en l'honneur d'Aristide Colonna »], Pérouse, Université de Pérouse, Institut de philologie classique, hors coll., , 1re éd., 1 vol., XVII-340-[5], 24 cm (OCLC 1055880656, SUDOC 157661806, présentation en ligne, lire en ligne), p. 173-181 (OCLC 1135619882).
- [Scherer 1994] Jacques Scherer, Dramaturgies du vrai-faux, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Écriture », , 1re éd., 1 vol., [VI]-152-[2], 13,5 × 21,5 cm (ISBN 2-13-046390-8, EAN 9782130463900, OCLC 300258709, BNF 35736139, DOI 10.3917/puf.scher.1994.01, SUDOC 003469115, présentation en ligne).
- [Taplin 2007] Oliver Taplin (trad. de l'anglais par Cécile Dudouyt), « Les Perses d'Eschyle : l'entrée de la tragédie dans la culture commémorative des années ? », dans Brigitte Le Guen (dir. et av.-prop.), À chacun sa tragédie ? : retour sur la tragédie grecque (actes de la journée d'étude tenue au Musée d'Art et d'Histoire de Saint-Denis en ), Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Histoire », , 1re éd., 1 vol., 171, 15,5 × 24 cm (ISBN 978-2-7535-0475-2, EAN 9782753504752, OCLC 470990082, BNF 41163722, DOI 10.4000/books.pur.6808, SUDOC 119854899, présentation en ligne, lire en ligne), chap. 1er, p. 13-23 (DOI 10.4000/books.pur.6815, lire en ligne).
- [Tourraix 1984] Alexandre Tourraix, « L'image de la monarchie achéménide dans les Perses », Revue des études anciennes, t. LXXXVI, nos 1-4, , p. 123-134 (OCLC 5959437433, DOI 10.3406/rea.1984.4175, lire en ligne).
- Consulter la liste des éditions de cette œuvre
- Les Perses, Eschyle, traduction de Pierre Judet de La Combe et Myrto Gondicas, (édition revue et corrigée du texte paru en 2003 aux éd. Comp'act), 2016.
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :