Problème des distances distinctes d'Erdős — Wikipédia
En géométrie discrète, le problème des distances distinctes d'Erdős concerne le nombre de distances distinctes possibles entre n points distincts du plan euclidien, nombre au sujet duquel plusieurs conjectures ont été posées par Paul Erdős, en 1946[1], et en 1996[2]. Elles concernent en particulier le minimum du nombre de distances distinctes[3]. Erdős et Guy ont aussi étudié les sous-ensembles de présentant inversement le maximum de distances possibles[4],[5].
Conjecture sur l'évaluation asymptotique de f(n)
[modifier | modifier le code]Dans son article de 1946, Erdős démontre l'encadrement pour une certaine constante [1]. Le minorant est calculé par un raisonnement élémentaire[6], et le majorant est donné par l'utilisation d'une grille rectangulaire de dimensions (car il y a nombres inférieurs à qui sont somme de deux carrés, voir constante de Landau-Ramanujan). Erdős a conjecturé que le majorant est une estimation assez précise de , c'est-à-dire que (voir notation de Landau).
En 2010, Larry Guth et Nets Hawk Katz annoncent avoir une solution[7],[8] ; elle est publiée en 2015 par les Annals of Mathematics[9], mais démontre seulement la minoration f(n) = Ω(n/ln n).
Résultats successifs
[modifier | modifier le code]La minoration f(n) = Ω(n1/2) donné par Paul Erdős en 1946 a été successivement amélioré :
- f(n) = Ω(n2/3) (Leo Moser, 1952),
- f(n) = Ω(n5/7) (Fan Chung, 1984)[10],
- f(n) = Ω(n4/5/ln n) (Fan Chung, Endre Szemerédi, W. T. Trotter, 1992),
- f(n) = Ω(n4/5) (László Székely, 1993),
- f(n) = Ω(n6/7) (József Solymosi, C. D. Tóth, 2001),
- f(n) = Ω(n(4e/(5e − 1)) − e) (Gábor Tardos, 2003),
Les 6 distances distinctes entre sommets du dodécagone régulier. 6 est le nombre minimal de distances entre 12 points formant un polygone convexe, mais pas entre 12 points quelconques où il vaut 5. - f(n) = Ω(n((48 − 14e)/(55 − 16e)) − e) (Nets Katz, Gábor Tardos, 2004),
- f(n) = Ω(n/ln n) (Guth et Katz 2015)
Cas d'un polygone convexe
[modifier | modifier le code]Dans son article de 1946, Erdős conjecture que si les points forment un polygone convexe alors le nombre minimal de distances distinctes est avec égalité lorsqu'ils forment un polygone régulier[1].
Valeur exacte de f(n) et configurations correspondantes
[modifier | modifier le code]Les valeurs de sont connues jusqu'à ( suite A186704 de l'OEIS) :
2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | 1 | 2 | 2 | 3 | 3 | 4 | 4 | 5 | 5 | 5 | 6 |

Jusqu'à , (le minimum est atteint entre autres par le n-gone régulier) ; pour , Erdős a trouvé trois autres configurations que l'ennéagone[2],[11].
Pour , le dodécagone régulier n'est plus minimal ; est atteint par une configuration utilisant des nœuds du réseau hexagonal[2],[11].

Erdős définit comme le nombre maximal de points du plan définissant distances distinctes ; est en quelque sorte la réciproque de :
- , et si [2],
- , et si .
Les valeurs de sont connues jusqu'à (suite A131628 de l'OEIS) :
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | |
---|---|---|---|---|---|---|
3 | 5 | 7 | 9 | 12 | 13 |
Erdős conjecture que pour il existe des ensembles de nœuds du réseau hexagonal de taille [2].
Ensembles minimaux présentant toutes les distances possibles
[modifier | modifier le code]
Un exemple d'ensemble de points du plan présentant les distances possibles entre eux est formé des points de coordonnées ; il s'agit d'un cas particulier de règle de Golomb, ensemble de points de présentant les distances possibles. Il existe des règles de Golomb plus courtes que celle des puissances de 2 ; par exemple est plus courte que . La liste des longueurs des règles de Golomb les plus courtes est donnée par la suite A003022 de l'OEIS :

2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | 3 | 6 | 11 | 17 | 25 | 34 | 44 | 55 |
Passant en dimension 2, Erdős et Guy ont posé en 1970 le problème d'évaluer les dimensions du plus petit carré de contenant points présentant les distances possibles[4],[12].
La liste du nombre de points sur le côté d'un tel carré est donnée par la suite A193838 de l'OEIS :
2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 9 | 10 | 11 | 13 | 15 | 16 | 18 |
Un dénombrement élémentaire montre que , donc que [4],[12].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) P. Erdős, « On sets of distances of n points », American Mathematical Monthly, vol. 53, , p. 248–250 (lire en ligne)
- (en) Paul Erdös, Peter Fishburn, « Maximum planar sets that determine k distances », Discrete Mathematics, vol. 160, , p. 115-125 (lire en ligne)
- ↑ (en) Julia Garibaldi, Alex Iosevich, Steven Senger, The Erdös distance problem, American Mathematical Society,
- (en) P. Erdős, R. K. Guy, « Distinct distances between lattice points, », Elemente der Mathematik, vol. 25, , p. 121-123 (lire en ligne)
- ↑ (en) R. K. Guy, Unsolved Problems in Number Theory, Third Edition, New York, Springer, , p. 367-368, problème F2
- ↑ Fabien Aoustin, « Des distances et des points », Bibliothèque Tangente, no 81, , p. 67
- ↑ (en) Terence Tao, The Guth-Katz bound on the Erdős distance problem
- ↑ (en) János Pach, Guth and Katz’s Solution of Erdős’s Distinct Distances Problem
- ↑ (en) Larry Guth et Nets H. Katz, « On the Erdős distinct distances problem on the plane », Annals of Mathematics, , p. 155–190 (DOI 10.4007/annals.2015.181.1.2, lire en ligne)
- ↑ (en) F. Chung, « The number of different distances determined by n points in the plane », Journal of Combinatorial Theory, (A), vol. 36, , p. 342-354 (DOI 10.1016/0097-3165(84)90041-4, lire en ligne [PDF])
- (en) Peter Brass, William O. J. Moser, János Pach, Research Problems in Discrete Geometry, Springer Science & Business Media, (lire en ligne), p. 200-207
- Fabien Aoustin, « Des distances et des points », Bibliothèque Tangente, no 81, , p. 64-66