Radhia Nasraoui — Wikipédia
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Radhia Nasraoui (arabe : راضية النصراوي), née en à Tunis[1], est une militante et avocate tunisienne, spécialiste des droits de l'homme, qui milite particulièrement contre l'usage de la torture[2].
Biographie
[modifier | modifier le code]Premiers pas
[modifier | modifier le code]Radhia Nasraoui commence à faire campagne dans les années 1970 en faveur du respect des droits humains. À cette époque, le régime du président Habib Bourguiba interdit les manifestations d'étudiants et de travailleurs. En 1976, elle parvient à convaincre le cabinet où elle travaille de défendre les étudiants qui sont accusés[3].
Deux ans plus tard, à la suite du Jeudi noir, une grève générale qui s'accompagne de sanglantes émeutes faisant de nombreuses victimes[4], Nasraoui ouvre son propre cabinet[5].
Lutte pour les droits humains
[modifier | modifier le code]Elle participe à la fondation de l'Association de lutte contre la torture en Tunisie qu'elle annonce le [6]. Désignée présidente, elle dénonce ce qu'elle considère comme la « torture systématique » pratiquée dans son pays depuis l'accession au pouvoir du président Zine el-Abidine Ben Ali le [7].
En raison de ses activités professionnelles en faveur des droits humains en Tunisie, Radhia Nasraoui continue à être exposée à la répression et à la violence policière. Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes des Nations unies rapporte alors certains faits :
« Le , le bureau de Radhia Nasraoui a été mis à sac et la plupart de ses dossiers volés [...] Sa maison est sous surveillance constante, sa ligne téléphonique est régulièrement coupée ou mise sur écoute. De plus, ses filles endurent des intimidations constantes. Le , en revenant de Paris, elle a été interceptée à l'aéroport de Tunis et tous ses documents (parmi lesquels des articles sur la répression en Tunisie) lui ont été confisqués. En août, sa voiture a été saccagée. Le harcèlement envers elle et ses filles s'est accru depuis le début du mois de janvier 2002[8]. »
Du au [9],[10], elle entame une grève de la faim « pour protester contre le harcèlement professionnel et familial dont elle est l'objet et pour réclamer que justice lui soit rendue après une agression physique subie en juillet »[11] ; elle y met fin le jour de la commémoration du 55e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Radhia Nasraoui continue à être exposée à la répression étatique jusqu'à la révolution de 2011[12] marquée par la chute du président Ben Ali. Durant cette période, elle est considérée comme l'avocate et la militante contre la torture la plus connue en Tunisie[13] puis comme un leader d'opinion du Printemps arabe[14],[15].
Même après la révolution, elle continue de dénoncer les cas de tortures et de mauvais traitements infligés aux prisonniers[16]. Elle est par ailleurs membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine dont les travaux commencent le [17].
En 2013, elle participe à la défense de la femen tunisienne Amina Sboui[18].
Vie privée
[modifier | modifier le code]Radhia Nasraoui est mariée avec Hamma Hammami, secrétaire général du Parti des travailleurs, depuis 1981 ; ils ont trois filles : Nadia, Oussaïma et Sarah[19].
Soutien à son mari
[modifier | modifier le code]Le , le Tribunal de première instance de Tunis condamne son mari Hamma Hammami ainsi qu'Abdeljabbar Madouri et Samir Taamallah — tous trois sortis le même jour de quatre ans de clandestinité — à plus de neuf ans de prison en raison de leur appartenance au Parti communiste des ouvriers de Tunisie, un parti non reconnu par les autorités[20]. Le , Hammami est condamné à trois ans et deux mois de prison à l'issue du procès en appel ; Madouri et Taamallah se voient respectivement infliger des peines de trois ans et neuf mois et un an et neuf mois d'emprisonnement[21].
Le , Nasraoui entame une grève de la faim à son domicile de Tunis pour protester contre l'emprisonnement de son mari :
« Par cette action, j'entends réclamer la libération immédiate et sans conditions de mon mari emprisonné pour ses opinions, et protester contre les mauvais traitements dont il est l'objet, ainsi que sa famille [...] Hamma n'a jamais pu voir sa famille dans des conditions humaines : deux grillages le séparent de ses visiteurs et la visite se déroule en présence de plusieurs gardiens. Il n'a toujours pas le droit de voir Sarra, née quand il vivait en clandestinité[22]. »
Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, déclare pour sa part qu'« il est scandaleux qu'une personne doive en arriver là pour que ses droits et ceux de sa famille soient respectés »[23]. Hammami est finalement libéré le , après la mobilisation de groupes internationaux de défense des droits humains[24],[25],[26].
Le , elle est à nouveau aux côtés de son mari qui entame une grève de la faim avec sept personnalités de l'opposition dont Ahmed Néjib Chebbi, secrétaire général du Parti démocrate progressiste, Abderraouf Ayadi, vice-président du Congrès pour la République, le juge Mokhtar Yahyaoui (en), Mohamed Nouri, président de l'Association internationale de soutien aux prisonniers politiques, et Lotfi Hajji, président d'un syndicat de journalistes tunisiens)[27]. Elles protestent durant 32 jours contre ce qu'elles considèrent comme la recrudescence des attaques contre la société civile tunisienne.
Elle engage le une grève de la faim pour protester contre la décision du gouvernement tunisien de retirer la protection permanente assurée par la garde présidentielle dont bénéficiait son mari[28].
Distinctions
[modifier | modifier le code]Le , l'université libre de Bruxelles lui décerne le titre de docteur honoris causa pour sa défense des droits humains et son engagement en faveur de l'émancipation de la femme tunisienne[29]. Kristian Berg Harpviken (en), directeur de l'Institut de recherche sur la paix d'Oslo juge probable, avant l'attribution du prix Nobel de la paix 2011, que Radhia Nasraoui figure parmi les lauréats en tant que représentante du Printemps arabe[30],[31].
En , Radhia Nasraoui figure parmi les lauréats Prix Roland Berger pour la dignité humaine remis par la Fondation Roland Berger (de) pour avoir « contribué de façon significative à la réussite du Printemps arabe et à la protection de la dignité humaine »[32].
Le , elle reçoit le Prix Olof-Palme avec le Saoudien Waleed Abu al-Khair[33].
Le , elle reçoit de l'université de Mons le titre de docteur honoris causa pour son engagement en faveur des droits humains en Tunisie[34].
Le , elle reçoit un hommage de l'Union nationale de la femme tunisienne[35].
Références
[modifier | modifier le code]- (en) Katalin Wrede, « Radhia Nasraoui: Leading the fight against torture in Tunisia », sur human-dignity-forum.org, (consulté le ).
- « Radhia Nasraoui : "Rien ne justifie la torture, pas même le terrorisme" », Jeune Afrique, (ISSN 1950-1285, lire en ligne, consulté le ).
- « Radhia Nasraoui, l'avocate en procès », L'Express, (ISSN 0014-5270, lire en ligne, consulté le ).
- (de) Klaus-Peter Schmid, « Tunesien: Generalstreik und Aufruhr », Die Zeit, (ISSN 0044-2070, lire en ligne, consulté le ).
- (en) « Biography of Radhia Nasraoui », sur africansuccess.org (consulté le ).
- « Radhia Nasraoui annonce la création d'une association de lutte contre la torture », Associated Press, 25 juin 2003.
- « La femme de la semaine : Radhia Nasraoui, une Tunisienne en colère », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le ).
- « Application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes par la Tunisie » [PDF], sur omct.org (consulté le ).
- (de) Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme, “Security First” und die Menschenrechte : Jahresbericht 2003, La Tour d'Aigues, Éditions de l'Aube, (ISBN 2-88477-076-3, lire en ligne), p. 332 et suiv.
- (de) « Radhia Nasraoui: Hungerstreik zur Verteidigung meiner Würde », sur gewerkschafterinnen.amnesty.at, (consulté le ).
- Monique Mas, « Radhia Nasraoui arrête sa grève de la faim », sur rfi.fr, (consulté le ).
- (de) Annegret Mathari, « Verschärfte Repression in Tunesien », Neue Zürcher Zeitung, (ISSN 0376-6829, lire en ligne, consulté le ).
- (de) Jahel Mielke, « Da wusste ich, dass ich etwas tun muss », Der Tagesspiegel, (ISSN 0941-9373, lire en ligne, consulté le ).
- (de) Parvin Sadigh, « Die Frauen der Revolte », Die Zeit, (ISSN 0044-2070, lire en ligne, consulté le ).
- « Radhia Nasraoui toujours attachante même avec ses outrances verbales », sur leaders.com.tn, (consulté le ).
- (de) « Tunesier beklagen Folter », sur n-tv.de, (consulté le ).
- « L'ancienne dissidente Radhia Nasraoui s'inquiète pour la transition tunisienne », Le Monde, (ISSN 0395-2037, lire en ligne, consulté le ).
- Kardiatou Traoré, « Femen Tunisie : le Comité de défense d'Amina crie au complot », sur afrik.com, (consulté le ).
- Aymen Gharbi, « Tunisie : l'étreinte entre Hamma Hammami et Radhia Nasraoui lors d'un meeting fait réagir la toile », sur huffpostmaghreb.com, (consulté le ).
- « Radhia Nasraoui arrête sa grève de la faim », sur rfi.fr, (consulté le ).
- Mohamed Haddad, « Tunisie : pour Radhia Nasraoui, la protection de son mari n'est "ni de l'aumône, ni un privilège" », Le Monde, (ISSN 0395-2037, lire en ligne, consulté le ).
- « Radhia Nasraoui a mis fin à sa grève de la faim », sur rsf.org, (consulté le ).
- « Radhia Nasraoui, son engagement pour les droits de l'homme et contre la torture en Tunisie », sur cri-irc.org, (consulté le ).
- (de) « Heftige Kritik am tunesischen Regime », Neue Zürcher Zeitung, (ISSN 0376-6829, lire en ligne, consulté le ).
- (de) « Radhia Nasraoui beendet Hungerstreik », sur gewerkschafterinnen.amnesty.at, (consulté le ).
- (en) « Hamma Hammani released from prison », sur en.rsf.org, (consulté le ).
- « Radhia Nasraoui : "Nous sommes libres et nous le resterons" », sur afrik.com, (consulté le ).
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- « DHC : courage ou imagination », sur ulb.ac.be (consulté le ).
- (en) « PRIO Director's Nobel Peace Prize Speculations 2011 », sur prio.no (consulté le ).
- (de) Christian Nünlist, « Geht der Friedensnobelpreis an das « Facebook-Girl »? », Aargauer Zeitung, (lire en ligne, consulté le ).
- « Radhia Nasraoui », sur leaders-afrique.com (consulté le ).
- « Radhia Nassraoui reçoit le Prix Olof Palme pour les droits de l'homme de 2012 », sur leconomistemaghrebin.com, (consulté le ).
- « L'UMons remet les insignes de Docteurs Honoris Causa à cinq éminentes personnalités », sur dhnet.be, (consulté le ).
- « L'Union nationale de la femme tunisienne rend hommage à Radhia Nasraoui », sur kapitalis.com, (consulté le ).
Liens externes
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- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Jean Albert et Ludivine Tomasso, « Radhia Nasraoui, son engagement pour les droits de l'homme et contre la torture en Tunisie », sur cri-irc.org, (consulté le ).
- (de) Mine Aktas, « Ich habe keinen Dank erwartet », sur rolandbergerstipendiaten.wordpress.com, (consulté le ).