Robert de Cricklade — Wikipédia

Robert de Cricklade
Fonction
Prieur
Prieuré Sainte-Frideswide
années 1130-années 1170
Philippe de Sainte-Frideswithe (en)
Biographie
Naissance
Vers les années 1100Voir et modifier les données sur Wikidata
Cricklade (?)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Entre et Voir et modifier les données sur Wikidata
Oxford (?)Voir et modifier les données sur Wikidata
Activités
Autres informations
Ordre religieux

Robert de Cricklade (né à Cricklade c. 1100 – mort à Oxford entre 1174 et 1179), prieur de Saint Frideswide à Oxford, est un écrivain anglais du Moyen Âge[1]. Il fut instituteur avant de se faire clerc. Outre plusieurs traités de théologie, il est l'auteur de la première biographie, aujourd'hui perdue, de Thomas Becket, l'Archevêque de Cantorbéry.

Robert est d'origine anglo-saxonne[2]. Il tint quelque temps une école de latin, qualifié de maître[3], puis devint chanoine régulier de l’abbaye de Cirencester avant d'être élevé, en 1139, au rang de prieur de Saint Frideswide d'Oxford, charge qu'il occupa au moins jusqu'en 1174 selon les sources[4]. En 1158, il effectua un voyage à Rome, poussant jusqu'en Sicile avant de revenir par Paris. Il aurait voyagé derechef à Rome en 1141, et à Paris en 1147, mais ce point n'est pas attesté. Il effectua un autre voyage en Écosse dans les années 1160. Quoique ses premiers biographes en fassent un chancelier d'Oxford, cette charge n'existait pas encore à l'époque du prieur Robert, et son rôle dans l'enseignement à cette époque reste obscur[5]. Selon Giraud de Barri[6], Robert, outre ses essais théologiques, parcourut les monastères d'Angleterre en quête de livres de Flavius Josèphe en hébreu[2].

Robert est l'auteur de plusieurs ouvrages dont on connaît l'essentiel par des manuscrits, mais certains ont été perdus. On lui attribue même un commentaire des Psaumes, préservé dans un seul manuscrit[7], mais qui est vraisemblablement de la plume de Robert de Bridlington[8].

Le Mariage de Jacob

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Le De connubio Iacob, allégorie du récit biblique de Jacob[9], fut composé après 1137, mais à l'époque où Robert était chanoine de Cirencester. Robert y cite Bernard de Clairvaux et Guillaume de Malmesbury parmi ses modèles[10]. Ce récit survit dans cinq manuscrits :

Anthologie de l'Histoire Naturelle de Pline

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La Defloratio historie naturalis Plinii est un épitomé de l'Histoire naturelle de Pline l'Ancien, dédié au roi Henri II d'Angleterre[11]. Il occupe une place importante dans la circulation des idées de Pline dans l'Europe médiévale, bien que sa valeur en tant que témoin du texte originel de Pline ait été exagérée[12],[13].

Il semble que la composition de ce recueil remonte aux années 1130, et qu'il ait servi de manuel pour des étudiants, avant de prendre la forme d'un livre dédié au roi Henri[14]. Il en existe aujourd'hui une édition critique[15]. Cinq manuscrits en sont connus :

  • Eton College, MS 134
  • Cathédrale d'Hereford , MS P.v.10, fols. 125r–177r
  • Londres, British Library, Royal MS 15 C. xiv
  • Biblioteca Apostolica Vaticana MS Vat. Regin. lat. 598 + 198
  • Wolfenbüttel,

Le Miroir de la Foi

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Le Speculum fidei est un recueil commenté de passages de l'Ancien et du Nouveau Testament, dédié à Robert II de Beaumont, et destiné à éclairer certains concepts fondamentaux de théologie[16]. Il a été composé entre 1164 et 1168, mais l'unique manuscrit survivant[17] s'ouvre sur un addendum contenant une décrétale de 1170 du pape Alexandre III[18],[19]. Ce texte est surtout connu pour la réfutation qu'y fait Robert des doctrines théologiques de Pierre Lombard[20]. Un seul manuscrit est en connu :

  • Cambridge, Corpus Christi College, MS 380, fols 2r–132v

Homélies sur Ézéchiel

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Les Omeliæ super Ezechielem forment un recueil de 42 homélies sur le Livre d'Ézéchiel et ont été écrites aux environs de 1172[21]. C'est une continuation des homélies sur Ézéchiel de Grégoire le Grand. Ce recueil est conservé dans deux manuscrits :

Vita et miracula sancte Thome Cantuariensis

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Robert a écrit cette Vie et Miracles de Saint Thomas de Cantorbéry entre 1173 et 1174[22]. Cet ouvrage, quoique perdu, a dû être la source de la saga islandaise consacrée à Becket, Thómas saga Erkibyskups, dont on a une transcription du XIVe siècle[23]. Cette saga contient plusieurs détails inédits sur la vie de Thomas Becket et constitue aujourd'hui l'une des principales sources sur ce personnage[24]. La vie de Robert fut aussi une des sources de l'hagiographie de Benet de St Albans[25]. Un historien contemporain a pu reconstituer en partie la Vita de Robert à partir de là[26]. Les principales sources du récit de la vie de Becket par Robert sont les écrits de Jean de Salisbury. Un biographe de Becket contemporain, Frank Barlow, avance que la biographie de Robert a disparu parce qu'elle était davantage favorable au point de vue royal qu'à celui de Rome[27].

Lettre à Benoît de Peterborough

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Benoît de Peterborough cite dans ses Miracula S. Thome Cantuariensis une lettre qu'il a écrite à Robert, où il rapporte sa convalescence d'une grave maladie, et attribue sa guérison aux prières de Thomas Becket. Un autre chanoine d'Oxford, nommé lui aussi Robert, aurait été guéri de la même manière[28].

Vie de Saint-Magnus

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L'original en latin de ce récit, le plus ancien sur la vie de Magnus Erlendsson, comte d'Orkney, est perdu ; le texte nous en est connu partiellement par une traduction en vieux norrois due à un certain « Meistari Roðbert ». On estime non sans quelque vraisemblance qu'il pourrait s'agir du même Robert de Cricklade[29].

Vita sancte Frideswide

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On a pu montrer[30] que la Vie de Saint Frideswide, consacrée à Frithuswith, saint patron du prieuré où officiait Robert à Oxford, était bien de Robert de Cricklade ; c'est, cela dit, une réécriture d'un ouvrage antérieur. Il en subsiste trois manuscrits :

  • Oxford, Bodleian Library, Laud Misc. 114, fols 132r–140r
  • Cambridge, Gonville and Caius College, 129, fols 167r–177v
  • Gotha, Forschungsbibliothek, MM. I.81, fols. 225v–230r

Mort et postérité

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Robert est mort après 1174, et a probablement été inhumé dans son prieuré[2]. Son successeur fut Philippe d'Oxford, qui dirigea la communauté jusqu'en 1179[31].

  1. Andrew N. J. Dunning, « St Frideswide's Priory as a centre of learning in early Oxford », Mediaeval Studies, vol. 80,‎ , p. 253–296 (ISSN 0076-5872, lire en ligne)
  2. a b et c (en) A.J. Duggan, « Cricklade, Robert of (d. in or after 1174) », dans Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press (lire en ligne Inscription nécessaire)
  3. R.W. Hunt, « English Learning in the Late Twelfth Century », Transactions of the Royal Historical Society, 4e, vol. 19,‎ , p. 19–42 (ISSN 0080-4401, DOI 10.2307/3678685, JSTOR 3678685)
  4. David Knowles, Vera C. London, et Christopher Brooke, The Heads of Religious Houses, England and Wales, 940–1216, Cambridge, Cambridge, UK University Press, (réimpr. Second), 410 p. (ISBN 978-0-521-80452-3, DOI 10.1017/CBO9780511496226), p. 180, 284
  5. On peut toutefois trouver des extraits des œuvres de Robert's sur l'étude, brièvement commentés, dans T.E. Holland et Montagu Burrows (ed.), Collectanea, 2e série, Oxford, Clarendon Press, coll. « Oxford Historical Society », (lire en ligne), « The university of Oxford in the twelfth century », 137–192
  6. Giraud de Barri, De principis instructione cité dans (en) Ruth Nisse, Jacob's shipwreck : diaspora, translation, and Jewish-Christian relations in medieval England, Ithaca, New York, Cornell University Press, , 248 p. (ISBN 978-1-5017-0831-2, DOI 10.7591/cornell/9781501703072.001.0001, lire en ligne), p. 20–23
  7. Oxford, Bodleian Library, MS Laud misc. 454.
  8. Richard Sharpe, Handlist of the Latin Writers of Great Britain and Ireland Before 1540, vol. 1, Louvain, Belgique, Brepols, coll. « Publications of the Journal of Medieval Latin », (ISBN 978-2-503-50575-6), p. 532–533
  9. (la) Rodney M. Thomson et Michael Winterbottom (trad. de l'anglais), William of Malmesbury. Miracles of the Blessed Virgin Mary, Woodbridge (Suffolk), Boydell Press, , 154 p. (ISBN 978-1-78327-016-3, lire en ligne), xv
  10. Andrew Dunning, « Robert of Cricklade: Why I Write », sur Medieval Manuscripts Blog / British Library, (consulté le )
  11. Karl Rück, « Das Exzerpt der Naturalis Historia des Plinius von Robert von Cricklade », Sitzungsberichte der philosophisch-philologischen und der historischen Classe der k. b. Akademie der Wissenschaften zu München,‎ , 195–285 (lire en ligne)
  12. Cf. L.D. Reynolds, Texts and transmission : a survey of the Latin classics, Oxford, Clarendon Press, , 307–316 p. (ISBN 978-0-19-814456-4), « The elder Pliny »
  13. Rodney M. Thomson, « England and the twelfth-century renaissance », Past & Present, vol. 101,‎ , p. 3–21 (ISSN 0031-2746, DOI 10.1093/past/101.1.3, JSTOR 650667)
  14. Martin Aurell, Noël-Yves Tonnerre et Elisabeth M.C. van Houts, Plantagenêts et Capétiens : confrontations et héritages, Turnhout, Brepols, coll. « Histoires de famille. La parenté au Moyen Âge », (ISBN 978-2-503-53781-8, DOI 10.1484/M.HIFA-EB.3.603), « Les femmes dans le royaume Plantagenêt: gendre, politique et nature », p. 95–112
  15. Bodo Näf, Roberti Crikeladensis Defloratio naturalis historie Plinii secundi, vol. 36, Berne, Lang, coll. « Lateinische Sprache und Literatur des Mittelalters », (ISBN 978-3-906770-29-1)
  16. Robert de Cricklade, Speculum fidei, prologue: Cambridge, Corpus Christi College, MS 380, fol. 2r; commenté par Paul Antony Hayward, « The earls of Leicester, Sygerius Lucanus, and the death of Seneca: Some neglected evidence for the cultural agency of the Norman aristocracy », Speculum, vol. 91, no 2,‎ , p. 328–355 (ISSN 0038-7134, DOI 10.1086/684917, lire en ligne)
  17. Cambridge, Corpus Christi College, MS 380, fols 2r–132v
  18. Andrew Dunning, « Robert of Cricklade », Arlima: Archives de littérature du Moyen Âge, (consulté le )
  19. Charles Homer Haskins, « Further Notes on Sicilian Translations of the Twelfth Century », Harvard Studies in Classical Philology, vol. 23,‎ , p. 155–166 (ISSN 0073-0688, DOI 10.2307/310450, JSTOR 310450)
  20. (en) Clare Monagle, Orthodoxy and controversy in twelfth-century religious discourse : Peter Lombard's "Sentences" and the development of theology, Turnhout, Brepols, , 88–92 p. (ISBN 978-2-503-52795-6, DOI 10.1484/M.ES-EB.5.106028)
  21. Beryl Smalley, The Becket conflict and the schools : a study of intellectuals in politics, Oxford, Blackwell, , 258 p. (ISBN 978-0-631-14400-7), p. 196–200
  22. D'après Haki Antonsson et Gareth Williams, Paul Bibire, Sagas, saints and settlements, Leyde, Brill, coll. « Northern world », , 153 p. (ISBN 978-90-04-13807-0, lire en ligne), « Two twelfth-century martyrs: St Thomas of Canterbury and St Magnus of Orkney », p. 41–64
  23. Eiríkr Magnússon, Thómas saga erkibyskups : a life of Archbishop Thomas Becket, in Icelandic, with English translation, notes and glossary, Londres, Longmans, (lire en ligne)
  24. The lives of Thomas Becket (Michael Staunton (ed.)), Manchester, Manchester University Press, coll. « Manchester medieval sources », , 255 p. (ISBN 978-0-7190-5454-9, DOI 10.7765/MMSO.54549.2.1, lire en ligne), 11
  25. E. Walberg, « Date et source de la Vie de saint Thomas de Cantorbéry, par Benet, moine de Saint-Alban », Romania, vol. 44, no 175,‎ , p. 407–426 (DOI 10.3406/roma.1916.4853)
  26. Margaret Orme, « A reconstruction of Robert of Cricklade's Vita et miracula S. Thomae Cantuariensis », Analecta Bollandiana, vol. 84,‎ , p. 379–398 (ISSN 0003-2468, DOI 10.1484/J.ABOL.4.02618)
  27. Frank Barlow, Thomas Becket, Berkeley, University of California Press, , 5–8 p. (ISBN 978-0-520-05920-7)
  28. James Craigie Robertson (ed.), Materials for the history of Thomas Becket, Archbishop of Canterbury, vol. 67/2, Londres, Longman, coll. « Rolls Series », (lire en ligne), p. 96–101
  29. (en) Haki Antonsson, St. Magnús of Orkney : a Scandinavian martyr-cult in context, Leyde, Brill, coll. « Northern world », , 269 p. (ISBN 978-90-04-15580-0, DOI 10.1163/ej.9789004155800.i-272, lire en ligne), p. 42–67, 222
  30. John Blair, « Saint Frideswide Reconsidered », Oxoniensia, vol. 52,‎ , p. 71–127 (lire en ligne)
  31. Philippe d'Oxford, Miracula sancte Frideswide 1 and 4, Oxford, Bodleian Library, Digby 177, fols 1v–2v. Partially quoted by Blair (1987), p. 118.