Thomas Howard (1er comte de Suffolk) — Wikipédia

Thomas Howard
Image illustrative de l’article Thomas Howard (1er comte de Suffolk)
Portrait en chevalier de la Jarretière

Titre Comte de Suffolk
Arme Marine
Grade militaire Amiral
Années de service 1602 - 1619
Gouvernement militaire Lord-chambellan puis
lord-trésorier
Faits d'armes victoire contre l'Armada, raid sur Cadix (1596), combat des Açores
Distinctions ordre de la Jarretière
Autres fonctions Lord-lieutenant du Suffolk ; Connétable de la Tour ; Chancelier de Cambridge
Biographie
Dynastie Howard
Nom de naissance Thomas Howard
Naissance
Décès (à 64 ans)
Charing Cross à Londres
Père Thomas, 4e duc de Norfolk
Mère Margaret Audley
Conjoint Mary Dacre ;
Katherine Knyvet
Enfants Theophilus, 2e comte de Suffolk
Thomas, 1er comte de Berkshire

Blason de Thomas Howard

Thomas Howard (), 1er comte de Suffolk, aussi baron Howard de Walden, chevalier de la Jarretière, amiral et homme d'État, est proche conseiller du roi Jacques, lord-chambellan puis lord-trésorier de la couronne d'Angleterre.

Fils de Thomas Howard, 4e duc de Norfolk, par son second mariage avec lady Margaret Audley[1], il hérite en 1564 les terres matrilinéaires, dont le manoir de Walden. Sur les instances de son père, en attente de son exécution à la tour de Londres (1572), Thomas épousa sa belle-sœur Mary, fille de Thomas Dacre (4e baron Dacre), et de la troisième femme du duc de Norfolk, Elizabeth Leyburne (en). Mais sa femme meurt sans enfant en à Saffron Walden[2].

En 1583, Howard se remarie avec Katherine Knyvet, veuve de Richard Rich, héritier du 2e baron Rich. Cette femme réputée pour sa beauté est aussi l'aînée et l'héritière de sir Henry Knyvet, de Charlton. Le couple a quatorze enfants[3] :

Exploits navals

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En , il est anobli Lord Thomas Howard en titre[2]. Quatre ans plus tard, il commande le Golden Lion lors de l'attaque de l’Armada : le , ce navire est l'un des trois galions anglais à contre-attaquer les galéasses qui couvraient le Sainte Anne. En reconnaissance de cet exploit, son parent le baron Howard d'Effingham l'arme chevalier le lendemain à bord de l’Ark Royal[5].

La Fin du Revenge (grav. 1804).

In 1591, on l'envoie à la tête d'une escadre sur les Açores pour intercepter le convoi espagnol des Amériques. Mais un premier convoi est déjà parvenu en Espagne lorsqu'il atteint les Açores, et le second convoi n'est pas attendu avant septembre. Contraint de débarquer pour soigner des hommes malades et effectuer diverses réparations, il eut à peine le temps de remettre ses navires à flot lorsque ses éclaireurs lui apprennent qu'une voile espagnole est en vue de l’île Florès ; or les navires qu'il s'apprête à combattre ne sont pas un convoi, mais une escadre partie de Ferrol pour l'anéantir. Le , Howard parvient à sauver sa flotte grâce au sacrifice de son vice-amiral, l’impétueux Sir Richard Grenville qui à bord du Revenge, affronte seul 53 galions ennemis avant de saborder son navire[6].

En 1596, Howard est vice-amiral aux côtés de sir Robert Devereux lors du deuxième raid contre Cadix (le premier datait de 1587). Favori de la reine Élisabeth, il est nommé chevalier de la Jarretière en , et au mois de juin suivant il repart pour les Açores (mais une fois encore sans succès) à la tête d'une expédition qu'il a en partie subventionnée[2].

Carrière politique

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Il est très malade lorsqu’à l’automne 1597, la Chambre des lords l’admet dans ses rangs en tant que baron Howard de Walden. Convalescent, il ne peut se présenter au parlement avant . Le , il devient membre honoraire de la Gray's Inn. En 1599, il commande la flotte anglaise au large des Downs, puis après avoir maté la révolte du comte d'Essex, reçoit la charge honorifique de connétable de la tour de Londres le . À ce titre, il est membre du jury qui condamne Essex et son comparse, Henry Wriothesley (3e comte de Southampton). Impliqué en permanence dans la guerre de course, il ne devait jamais rentrer dans ses frais à cet égard. Toujours à cette époque, il prêta serment de grand-steward de l’université de Cambridge, charge qu'il détiendra jusqu'en 1614[2] (il est nommé MA de Cambridge en 1605[7]).

Ami de Robert Cecil, il prit les fonctions de lord-chambellan à la fin de 1602, et était de la cour d'Elisabeth dans les dernières semaines de son règne (), à la chartreuse de Londres. Sous le règne du roi Jacques, Howard entra d'emblée dans le cercle des favoris, confirmé en tant que lord-chambellan le puis conseiller privé le . Puis le , il était élevé au rang de comte de Suffolk. Il fut en outre choisi pour composer la commission de création de l’ordre du Bain, et de 1604 à 1618 pour la recréation des comtes-maréchaux (Earl Marshal). Lord-lieutenant du Cambridgeshire depuis plusieurs années, il fut affecté lord-lieutenant du Suffolk en 1605[2].

Lors des pourparlers de paix de 1604, Suffolk accepta un cadeau de l'ambassadeur en Espagne, mais c'est surtout sa femme, activiste catholique, qui s'avéra une informatrice précieuse pour le diplomatie étranger. Intéressée, elle alla jusqu'à accepter une pension annuelle de 1 000 £ de la couronne d'Espagne. Moins impliqué que son épouse, Suffolk subissait néanmoins son influence en matière politique, ce qui devait lui coûter cher par la suite[2].

À partir de 1605, Robert Cecil (désormais comte de Salisbury), le comte de Suffolk, Henry Howard (comte de Northampton), et Edward Somerset (comte de Worcester) étaient les seuls conseillers de Jacques Ier. Suffolk et Salisbury furent informés par le baron Monteagle de la conspiration des Poudres, ce qui permit à Suffolk d'inspecter les caves, et de découvrir les tonnelets de poudre cachés sous des fascines. Dans la soirée, Sir Thomas Knyvet, gardien du Palais (qui était d'ailleurs un beau-frère de Suffolk) mena plusieurs interrogatoires, éventant ainsi le complot. Suffolk fut tout naturellement choisi pour arrêter et juger les conjurés[2].

Ravalé par Jacques Ier, avec les comtes de Salisbury et de Northampton, dans le « trio des valets » (trinity of knaves), le souverain voyait pourtant en Thomas Howard un homme loyal et fiable. En , le fils aîné et héritier du comte de Salisbury, William Cecil, épousa la troisième fille d'Howard, Catherine. Le comte de Salisbury, qui devai mourir en 1612, rendit hommage à l’amitié du comte de Suffolk dans son testament ; peu après, Suffolk fut nommé parmi les lords du Trésor. Malgré son dédain pour Sir Robert Carr, le favori du roi, Thomas Howard appuya la demande en divorce de sa fille Frances qui voulait l'épouser. Elle se remaria en , peu après l'élévation de son futur mari au rang de comte de Somerset[2].

Le , le comte de Suffolk devint chancelier de l’université de Cambridge en remplacement de son cousin le comte de Northampton. Le , il devint Lord trésorier tandis que son beau-fils, le comte de Somerset, lui succédait au poste de lord-chambellan : Suffolk et sa famille étaient alors au faîte de leur puissance[2].

Mais en 1615, la disgrâce du comte de Suffolk s'amorça. Jacques Ier s'entichait désormais de Sir George Villiers, cependant que la fille du comte de Suffolk, Frances, désormais comtesse de Somerset, était impliquée dans l’empoisonnement de Sir Thomas Overbury. Suffolk fut accusé de complicité avec le comte de Somerset par Jacques Ier pour entrave à l’enquête, mais parvint cette fois à se laver des soupçons. Toutefois, il commit une erreur en tentant de saper la faveur croissante du duc de Villiers : il introduisit à la cour un rival destiné à supplanter Villiers auprès du roi. Or, non seulement cette manœuvre échoua complètement, mais elle déchaîna chez Villiers, devenu entretemps (1618) marquis de Buckingham, un désir de vengeance : ce dernier entreprit d'attaquer le comte sur sa gestion du Trésor[2].

Les finances du comte de Suffolk avaient à vrai dire toujours été chancelantes. Ses investissements dans la guerre de course et le commerce l’avaient chaque fois mené au bord de la faillite, malgré les aides substantielles de la reine Élisabeth. Sous le règne du roi Jacques, sa situation s'était rétablie par sa préséance à la cour, qui outre le logis et le couvert, lui apportait de confortables émoluments, ainsi que la restitution de plusieurs terres que la Couronne avait confisquées à son père. Il réinvestit une partie de ces biens dans l’achat de nouvelles terres en Est-Anglie, tout en bénéficiant de la perception des droits seigneuriaux et de legs de ses parents. Contraint de mettre en vente en 1611 son hôtel particulier, la chartreuse de Londres, il put s'installer dès 1614 dans l'hôtel qu'il avait hérité des comtes de Northampton à Charing Cross. Mais le comte de Suffolk aggrava sa situation en se lançant dans d'extravagants programmes immobiliers : Audley End House, construite entre 1603 et 1616, devint le plus grand hôtel particulier d'Angleterre. Il ajouta au manoir de Charing Cross une nouvelle aile somptueuse, tandis que sa femme faisait aménager les jardins de Charlton Park sur les grandes domaines des Knyvett dont elle venait d'hériter, et leurs enfants n'étaient pas en reste : Thomas Howard dépensa des sommes considérables pour qu'ils puissent tenir leur rang à la cour, et accordait des dots généreuses à ses filles. Cette stratégie du paraître, si elle s'avéra fructueuse sur le plan politique, endetta le comte jusqu'à un déficit en 1618 de 40 000 £ de prêts et d'hypothèques diverses. Ses appointements de lord-trésorier avaient pu rétablir sa situation financière en 1614, mais ni les facilités accordées aux fermiers ni les accords occultes contractés avec eux ne suffirent à combler ses déficits : ce devait être le prétexte à sa chute politique[2].

Arrestation et disgrâce

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Par l'entremise du comte de Buckingham, Jacques Ier fut mis au fait des agissements du lord-trésorier ; d'un poids particulier furent les allégations selon lesquelles la comtesse de Suffolk rançonnait les créanciers de la Couronne, leur extorquant encore de l'argent avant même qu'ils aient pu percevoir le moindre remboursement. Le comte de Suffolk fut d'abord destitué de sa charge de Trésorier en  ; puis au début de 1619, sa femme contracta la variole qui ravagea son visage réputé pour sa beauté, tandis que le comte de Suffolk lui-même plaida la maladie pour se soustraire au procès. En vain : au mois d', Thomas Howard, sa femme et leur protégé, sir John Bingley, avoué de l'Échiquier, furent inculpés de divers chefs de corruption devant la Chambre étoilée. Le procureur, sir Francis Bacon, compara Lady Suffolk à une boutiquière tenant la caisse tandis que son apprenti, Bingley, criait dehors « Il en manque? »[4]. Le , le trio fut reconnu coupable de tous les chefs d'accusation. On leur infligea une amende de 30 000 £, et une peine de prison laissée à la discrétion du Roi[2].

Au bout de dix jours de détention, Suffolk et sa femme furent libérés ; ils firent appel à Buckingham pour qu'il intercède en leur faveur. Bien que le comte de Suffolk continuât d'irriter Jacques Ier par des manœuvres juridiques visant à éviter la saisie de ses biens, le duc de Buckingham entendait se montrer magnanime envers un rival dont la faveur était à présent réduite à néant. Buckingham ménagea à Suffolk une audience auprès du roi, et l'amende fut ramenée à 7 000 £. En 1623, le plus jeune fils du comte de Suffolk, Edward épousa une nièce du duc de Buckingham, Mary Boteler. Le comte de Suffolk, désormais exclu des hautes charges, continua de siéger à la Chambre des lords, et fut membre de deux commissions relatives aux affaires religieuses. Il mourut dans son hôtel de Charing Cross le et fut inhumé le à Saffron Walden[2].

Liens externes

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Notes et références

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  1. Décédée le 10 janvier 1564, fille et héritière de Thomas, baron Audley de Walden.
  2. a b c d e f g h i j k l et m Pauline Croft, Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press, (lire en ligne), « Howard, Thomas, first Earl of Suffolk (1561–1626) ».
  3. « Howard pedigree 2 » (consulté le ).
  4. a b c et d « Thomas Howard, 1st Earl of Suffolk » (consulté le ).
  5. William Camden, Annales Rerum Gestarum Angliae et Hiberniae Regnante Elizabetha, (lire en ligne).
  6. « The Last Fight of the Revenge » (consulté le ).
  7. Howard, Thomas dans (en) J. Venn et J. A. Venn, Alumni Cantabrigienses, Cambridge, Angleterre, Cambridge University Press, 1922–1958 (ouvrage en 10 volumes).