Sanaa — Wikipédia

Sanaa
(ar) صنعاء
De haut en bas, de gauche à droite : immeubles de la vieille ville, la mosquée al-Saleh, vue de la vieille ville, la porte du Yémen, le musée national.
Administration
Pays Drapeau du Yémen Yémen
Gouvernorat Sanaa
Démographie
Gentilé Sanaanéens[1]
Population 2 187 392 hab. (2010)
Géographie
Coordonnées 15° 21′ 11″ nord, 44° 12′ 54″ est
Altitude 2 260 m
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Yémen
Voir sur la carte administrative du Yémen
Sanaa

Sanaa (\sa.na\), aussi orthographié Sana ou, plus fidèlement, San'a' (en arabe : صنعاء / ṣanʿāʾ), est la capitale et la plus grande ville du Yémen, ainsi que le centre administratif du gouvernorat de Sanaa.

Cependant, le district d'Amanat Al Asimah, dans lequel elle se trouve, dispose d'une très large autonomie, au point d'avoir un statut équivalent au gouvernorat (subdivision administrative).

Géographie

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Localisation

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La ville est située à environ 2 200 mètres d'altitude[2], sur un plateau entre le djebel Nogoum et le djebel Ayban.

  Les températures relevées à Sanaa[3] ne dépassent jamais les 30°C, la ville étant située à plus de 2200 mètres d'altitude. Cela explique aussi la relative fraîcheur de septembre à mai. En revanche, sur la côte, et les régions de faibles altitudes, le thermomètre enregistre régulièrement, lors des périodes estivales, des températures de plus de 45°.

Mois Janv Fév Mars Avr Mai Juin Juil Août Sept Oct Nov Déc Année
Températures minimales moyennes (°C) 5.1 8.0 9.7 11.5 13.6 15.8 16.7 16.3 12.4 9.1 6.8 6.2 10.93
Températures maximales moyennes (°C) 19.8 20.2 22.8 25.5 26.0 27.1 27.7 25.9 23.7 22.0 20.7 19.7 23.42
Moyennes mensuelles de précipitations (mm) 0.0 2.0 9.9 14.7 4.7 17.8 49.9 63.6 24.0 7.5 4.4 0.0 198.5

Vieille ville de Sanaa *
Image illustrative de l’article Sanaa
Pays Drapeau du Yémen Yémen
Type Culturel
Critères (iv) (v) (vi)
Numéro
d’identification
385
Région États arabes **
Année d’inscription 1986 (10e session)
Classement en péril 2015
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO

Antiquité et Moyen-Âge

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Les premières traces de peuplement remontent au Xe siècle av. J.-C.[2][Pas dans la source]. Capitale de différents royaumes arabes préislamiques dans l'Antiquité, Sanaa est devenue au VIIe siècle et au VIIIe siècle un centre culturel islamique[2]. Elle en garde un patrimoine important avec une université musulmane et 106 mosquées[2]. Sanaa a donc été habitée depuis plus de 3000 ans et on retrouve son patrimoine religieux, culturel et politique dans ses 106 mosquées, ses 12 hammams et ses 6 500 maisons qui datent tous d’avant le XIe siècle[2].

Sanaa est un chef-d'œuvre artistique et architectural ancien héritant de l'architecture sabéenne antique, ce qui rend la ville unique et l'a fait inscrire au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1986.

Pendant l'occupation du royaume d'Himyar par les Aksoumites au VIe siècle, la capitale est transférée de Zafār vers Sanaa.

Époque moderne

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Pendant la période ottomane, Sanaa est le chef-lieu de l'eyalet du Yémen de 1549 à 1626 ; elle devient ensuite la capitale des imams qasimides chiites qui chassent les Ottomans du Yémen en 1635. Lors de la seconde conquête ottomane, la ville est reprise par les Ottomans en 1872 et devient le chef-lieu du vilayet du Yémen qui durera jusqu'en 1918. La garnison ottomane réside dans la citadelle et autour de la mosquée sunnite Al-Bakiriyya. Les administrations et casernes et ottomanes, avec le commandement du 7e corps d'armée, se fixent dans le nouveau quartier de Bir el Azeb[4]

Après l'indépendance du pays en 1918

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À l'indépendance du Yémen, en 1918, Sanaa en devient la capitale. Cependant, Le roi Ahmed ben Yahya la quitte en 1948 pour fixer sa résidence à Ta'izz, ce qui freine le développement de la ville. La capitale revient à Sanaa en 1962 lors de la proclamation de la République arabe du Yémen. Pendant la guerre civile du Yémen du Nord (1962-1970), la ville est occupée par l'armée égyptienne qui y mène un effort de modernisation ; en 1967, elle est assiégée pendant 8 mois par les forces royalistes[4].

Guerre civile de 2014

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Le , les rebelles Houthis s'emparent de la ville[5]. Le , trois attaques suicides visent simultanément deux mosquées chiites. Ces attentats, les pires de l'histoire du pays (142 morts et des centaines de blessés), sont revendiqués le lendemain par Daesh.

Le , la vieille ville est inscrite sur la liste du patrimoine mondial en péril[6]. En 2015 et 2016, elle subit plusieurs raids aériens de la coalition formée par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis[7].

Le , le maire Abdel Kader Hilal est tué dans un raid aérien saoudien. Les bombardements, qui visaient un enterrement, font au moins 140 morts et 500 blessés parmi la foule[8].

Le , l'ancien président Ali Abdallah Saleh est tué alors qu'il tente de se désolidariser des Houthis au profit d'une alliance avec l'Arabie saoudite.

La ville est soumise à des bombardements par l'Arabie saoudite, tuant un grand nombre de personnes et rendant la vie très difficile. L’humanitaire Suad Al-Qadri explique que « Ce sont les civils qui sont victimes de la plupart des raids aériens. Les bombes s’abattent à proximité des zones d’habitation voire directement sur les maisons. Ces frappes n’épargnent personne. Nous vivons la peur au ventre, nous sommes stressés… Toute cette instabilité nous fait beaucoup de mal […] A Sanaa nous vivons dans le noir. La vie est difficile et nous passons notre temps à essayer de trouver des bougies ou des piles pour les lampes-torches pour pouvoir nous éclairer. Nous avons des difficultés à trouver de l’eau aussi. Sans parler du manque de nourriture. Sans carburants, il n’y a pas de transports et sans moyens de transport, il n’y a pas non plus d’approvisionnement »[9].

Le blocus mis en place par la coalition rend très difficile l'arrivée de l'aide humanitaire. Celle-ci arrive au compte-gouttes et bien souvent périmée. La population manque de tout : nourriture, médicaments, essence, matériaux de construction. Beaucoup d'enfants sont rachitiques, épuisés par la dysenterie, contaminés par l’uranium appauvri contenu dans les bombes larguées par les avions[10].

Administration

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Jumelages et partenariats

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La ville de Sanaa est jumelée avec :

En 1987, Sanaa a signé un traité de coopération avec la ville de Paris.

Évolution démographique

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Année Populations
1911 20 000
1921 23 000
1931 25 000
1940 80 000
1963 100 000
1965 110 000
1975 134 600
1981 280 000
1986 427 505
1994 954 448
2001 1 590 624
2005 1 937 451
2007 2 146 587
2010 2 187 392

La vieille ville est inscrite au patrimoine mondial depuis 1986 [2],[11]. Un des monuments notables de la région de Sanaa est le palais Dhar Al Hajjar.

Sanaa a été désignée par l'UNESCO « Capitale culturelle du monde arabe » pour 2004.

La ville est aussi au coeur de l'intrigue de la saison 5 de Prison Break, où le personnage de Michael Scofield est détenu dans la prison fictive d'Ogygia[12].

Manuscrits de Sanaa

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Un grand nombre d'anciens corans datant du premier siècle de l'Hégire ont été découverts dans la Grande Mosquée de Sanaa[13]. En 1972, pendant des travaux de restauration, une cache fut découverte entre le plafond et le toit de la structure, remplie d'une pile de parchemins anciens, en mauvais état et apparemment sans valeur. Ils furent néanmoins conservés, car porteurs apparemment de fragments du Coran.

Qadhi Isma'il al-Akwa, président de l'Autorité des antiquités yéménites estima que les ouvriers avaient découvert l'équivalent de ce que, dans le judaïsme, est nommé une gueniza (espace dans la synagogue réservé au dépôt des objets liturgiques et vieux livres ou écrits abîmés mais interdits à la destruction ou à l'abandon car ils portent le nom de Dieu. Ces documents y étaient conservés un certain temps avant d'être par la suite enterrés). Les musulmans lettrés partageaient ce point de vue de retirer de la circulation les copies usées ou endommagées du coran pour n'employer que des ouvrages en bon état, mais se refusaient à détruire des corans abîmés. Une cachette sûre était nécessaire pour protéger les livres du vol, de la profanation ou de la destruction en cas d'invasion éventuelle, ce qui explique cette « tombe pour corans » dans la grande mosquée de Sanaa[14].

Aucun universitaire yéménite n'ayant encore de formation sur la préservation des fragments, Al-Akwa obtint une assistance internationale pour leur préservation, leur classement et leur étude. En 1997, un universitaire allemand persuada son propre gouvernement d'organiser et de financer un projet de restauration.

En 1984, en coopération entre le Yémen et l'Allemagne, la Maison des Manuscrits (Dar al Makhtutat) fut inaugurée non loin de la Grande Mosquée. La restauration des manuscrits s'organisa avec Gerd-Rüdiger Puin de l'université de Saarland en Allemagne.

Le Qanbus est un instrument à cordes pincéés originaire du Yémen où on l'appelle aussi oud de Sanaa. Le chant de Sanaa ait été en 2003 proclamé "Chef-d’œuvre du Patrimoine Oral et Immatérial de l'Humanité" par l'UNESCO[15],[16],[17]

Sanaa est desservie par l'aéroport international El Rahaba.

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Bibliographie

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  • Miquel Barceló (dir.), Les Jardins de la vieille ville de Sanaa, Yémen : inventaire établi lors de la mission UNESCO octobre- et janvier-, Universitat Autònoma de Barcelona, Servei de Publicacions, Bellaterra (Barcelona), 2004, 140 p. (ISBN 84-490-2333-5)
  • Guillemette et Paul Bonnenfant, Les vitraux de Sanaa : premières recherches sur leurs décors, leur symbolique et leur histoire, CNRS, Paris, 1981, 99 p. (ISBN 2-222-03003-X)
  • Guillemette et Paul Bonnenfant, L'art du bois à Sanaa : architecture domestique, Edisud, Aix-en-Provence, 1987, 191 p. (ISBN 2-85744-315-3)
  • Paul Bonnenfant (dir.), Sanaa : architecture domestique et société, CNRS éd., Paris, 1995, 644 p. (ISBN 2-271-05068-5)
  • Gilbert Grandguillaume, Franck Mermier et Jean-François Troin (dir.), Sanaa hors les murs : une ville arabe contemporaine, URBAMA, Tours, CFEY, Sanaa, 1995, 247 p.
  • Fouad Khoury, Architecture de Sanaa, Éditions Le Sycomore, Paris, 1979, 111 p.
  • Jean Lambert, La médecine de l'âme : musique et musiciens dans la société citadine à San'a' (République du Yémen), EHESS, 1990 (thèse de sociologie)
  • (en) Ronald Lewcock, The old walled city of Ṣanʿāʾ, UNESCO, Paris, 1986, 124 p. (ISBN 92-3-102362-4)
  • Vincent Martignon, « Les lûkanda de Sanaa. Structures urbaines d'intégration sociale pour les travailleurs migrants ? », Chroniques yéménites,‎ (DOI https://doi.org/10.4000/cy.162, lire en ligne)
  • Franck Mermier, Le cheikh de la nuit : Sanaa, organisation des souks et société citadine, Actes sud, Arles, 1996, 253 p. (ISBN 2-7427-1046-9) (texte remanié d'une thèse)
  • Samia Naïm-Sanbar, L'arabe yéménite de Sanaa, Peeters, Leuven, Paris, 2009, 232 p. (ISBN 9782758400882)
  • Christian Julien Robin, « Une Arabie juive et chrétienne », L'Histoire,‎ , p. 46-51 (lire en ligne)
  • Éléonore Cellard, « Enquête sur le palimpseste de Sanaa », L'Histoire,‎ , p. 42-43 (lire en ligne)

Articles connexes

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Liens externes

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Notes et références

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  1. http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/no_106_janv-mars_2009_cle446315.pdf
  2. a b c d e et f Vieille ville de Sanaa., whc.unesco.org
  3. Moyennes météo, Sanaa, YEM
  4. a et b Jean-Marc Prost-Tournier, « Sana'a. Présentation de la capitale du Yémen », Revue de géographie de Lyon, vol. 50, no 4,‎ , p. 361-381 (lire en ligne).
  5. Pourquoi Les Houthis ne dirigent pas le Yémen après la chute de Sanaa ?, aa.com.tr, 6 octobre 2014.
  6. Yemen’s Old City of Sana’a and Old Walled City of Shibam added to List of World Heritage in Danger, UNESCO, 2 juillet 2015.
  7. Gulf Institute for Democracy and Human Rights, War Crimes in Yemen: Targeting Cultural and Historical Objects, juin 2020.
  8. (en) « Yemen: Blasts kill 140 people at Sanaa funeral », sur aljazeera.com (consulté le )
  9. « Yémen : vivre à Sanaa sous les bombes, «dans le noir» et «la peur au ventre» », sur RFI,
  10. « « Enquête exclusive », sur M6, plonge au cœur d’une sale guerre au Yémen, vue du côté rebelle », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  11. une cité millénaire qui s’éteint ? Regard de Patrimoine sans frontières sur Sanaa.
  12. Anisandrasha, « Drabzeen: Prison Break in Yemen », sur Drabzeen, (consulté le )
  13. Le Coran ; nouvelles approches
  14. Le Monde, 7 septembre 2001.
  15. Mokrani 2007.
  16. Lambert 2010.
  17. Lambert 2004.
  • Samir Mokrani, « Musique et identité au Yémen », Cahiers d'ethnomusicologie, vol. Vol. 20, identités musicales,‎ , p. 191-207 (JSTOR 40233866)
  • Jean Lambert, « Le musicien Yahyâ al-Nûnû: L'émotion musicale et ses transformations (Yémen) », Cahiers d'ethnomusicologie, vol. Vol. 23, émotions,‎ , p. 147-171 (JSTOR 23267128)
  • Jean Lambert, « Temps musical et temps social au Yémen. La suite musicale et le magyal de Sanaa », MUSIQUE ET ANTHROPOLOGIE, vol. No. 171/172,‎ , p. 151-171 (JSTOR 27976184)