Sarbadars — Wikipédia

Sarbadars
(fa) سربدار / Sarbadār

13371381

Description de cette image, également commentée ci-après
Carte du territoire des Sarbadars sous le règne de Muhammad Aïtimour en 1345
Informations générales
Statut Oligarchie, république
Capitale Sabzevar
Langue(s) Persan
Religion Islam chiite duodécimain
Superficie
Superficie (en 1350) env. 300 000 km2
Histoire et événements
1337 Indépendance de l’Ilkhanat
1353 Les Sarbadars annexent les derniers territoires de l'Ilkhanat dans l'actuel Turkménistan
1381 Khwaja Ali-yi Mouayyad se soumet à Timour
Rois
(1er) 1332-1338 ʿAbd al-Razzâq Bâchtînî
(Der) 1379-1381 Khwaja Ali-yi Mouayyad ibn Massoud

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Les Sarbadars (en persan : سربداران / Sarbadârân, « brigands ; gibiers de potence », de سر / sar, « tête » et بدار / badâr, « gibet ») ou Sarbédâriens[1] sont une des dynasties locales apparue après la chute des Il-Khanides. Damghan devient un foyer de contestation. Les Sarbadârs ne reconnaissent pas la monarchie héréditaire. Ibn Battûta en fait une description très défavorable[2]. En 1357/1358, Pahlavân[3] Hasan Dâmghânî devient sardâr[4] (commandant) de la ville de Sabzevar. La même année, il fait face à une insurrection menée par ʿAlî Moʾayyad à Damghan. ʿAlî Moʾayyad frappe des monnaies chiites (1361/1362) et cela devient la règle lorsque les Sarbadârs adoptent le chiisme comme leur religion officielle. Cependant en 1381, ʿAlī Moʾayyad doit se soumettre à Tamerlan. Damghan subit trois massacres de population en cinquante cinq ans : en 1404 par Tamerlan, en 1448/1449 par le timouride Abd ul-Latif et en 1457 par les Qara Qoyunlu[5].

Le premier Sarbadâr est aussi le plus connu d’entre eux. ʿAbd al-Razzâq Bâchtînî, est le fils d’un riche propriétaire terrien. Il part rejoindre son frère Amīn al-Dîn qui était un lutteur célèbre à la cour de l’il-Khan Abu Saïd. ʿAbd al-Razzâq s’illustre lui aussi dans ce métier. Son talent est récompensé en lui confiant une mission de percepteur dans la province de Kerman. Il dilapide ses richesses en débauches. Après la mort d’Abu Saïd, il revient dans son village natal. Il s’associe à un mouvement villageois de protestation contre les taxes excessives prélevées par le vizir ʿAlâʾ al-Dîn Muhammad Faryûmadî. La population de Bayhaq (Sabzevar) manifeste un profond ressentiment contre ce vizir et sa famille à cause de sa corruption. À la tête d’une petite bande, ʿAbd al-Razzâq parcourt la région en pillant les caravanes et en attaquant par surprise les forteresses. En , il s’empare de Sabzevar. En novembre, il marche sur Forûmad[6] qu’il pille. La rébellion des Sarbadârs prend de l’ampleur faute de forces capables de la contrecarrer. Les armées mongoles ont délaissé le Khorassan et sont alors en campagne en Azerbaïdjan. Le mouvement se heurte cependant aux propriétaires terriens dont un des frères d’ʿAbd al-Razzâq, Wajîh al-Dîn Mas`ud se fait le représentant. En juin ou , ʿAbd al-Razzâq est assassiné par Wajîh al-Dîn Mas`ud[7].

Cependant Wajîh al-Dîn Mas`ud continue l’œuvre d’ʿAbd al-Razzâq en s’emparant de Nichapur. L’il-khanide Togha Temür[8], descendant de Khassar frère de Gengis Khan est proclamé khan la même année. Il s’établit à Bastām. Les Sarbadârs reconnaissent nominalement sa suzeraineté[9].

En 1342, Wajîh al-Dîn Mas`ud part en campagne contre Hérat puis en 1344, dans le Mazandaran. Il laisse le commandement à Muhammad Aïtimour, un fils d’esclave, probablement le fils d’un soldat-esclave (gholâm[10]) turc. Wajîh al-Dîn Mas`ud meurt pendant sa campagne dans le Mazandaran, Ay Tīmūr Muhammad prend sa succession. Il reconnaît la suzeraineté de Togha Temür. Il place ses meilleures troupes sur les frontières et en accroît le nombre par l’apport des derviches dont le chef Ḥasan Jūrī a été tué par Wajîh al-Dîn Mas`ud. C’est un succès militaire mais un échec politique car les derviches le haïssent car ils le considèrent comme le représentant de Wajîh al-Dîn Mas`ud, l’assassin de leur maître. En août/, les derviches alliés aux descendants d’ʿAbd-al-Razzāq and Masʿūd se débarrassent du « fils d’esclave » Muhammad Aïtimour[11].

Vers , les Sarbadârs assassinent Togha Temür et restent ainsi maîtres de tout le nord-ouest du Khorassan, les Kert gardent le sud-est avec pour capitale Hérat. Ces deux dynasties se font une guerre acharnée, aggravée des prétextes religieux : les Kert étaient des Afghans sunnites, les Sarbadârs des Persans chiites. Une troisième dynastie exactement arabo-iranienne, les Muzaffarides, s’était établie dans la province de Kerman et le Fars. Son fondateur, l’arabe Mubâriz ad-Dîn Muhammad, déjà installé à Yazd et dans la province de Kerman, se rend maître de Chiraz (1353) et d’Ispahan (1356-1357). En 1358, il est déposé et aveuglé par son fils, Jalâl ad-Dîn Shâh Shujâ` qui lui succède à Chiraz, tandis qu’Ispahan passait à son frère Qutb ad-Dîn Shâh Mahmûd[9].

Ce morcellement général du pays livre le peuple iranien au premier envahisseur résolu. Gengis-khan jadis avait au moins trouvé en face de lui le pouvoir des Khwârazm-Shahs étendu de Kaboul à Hamadan. En face de Tamerlan il y a quatre ou cinq pouvoirs rivaux, profondément divisés entre eux, à qui l’idée de l’union contre l’envahisseur turc ne viendrait même pas : les Kert, de race afghane, de religion sunnite, à Hérât, sont les ennemis jurés des Sarbadârs, de race persane, de religion chiite à Sabzevar; les Muzaffarides, de race arabo-persane, au Fars, sont les rivaux des Jalayirides, de race mongole, maîtres de Tabriz et de Bagdad. Tamerlan trouve des adversaires livrés d’avance. La Perse de 1380 appelait la conquête[12].

En 1381, le Kert Ghiyâth al-Dîn vient de prendre Nichapur aux Sarbadârs. Tamerlan marche sur Hérat. Ghiyâth al-Dîn s’est replié dans la forteresse de Sérakhs, au sud de Hérat. La forteresse de Bouchang, au nord-est de Hérât est prise d’assaut. La population de Hérat n’est pas disposée à se battre contre l’envahisseur. Ghiyâth al-Dîn se soumet à Tamerlan qui lui laisse le gouvernement de Hérat mais se fait livrer toutes les richesses de la ville. Les murailles de la ville sont rasées. Ghiyâth al-Dîn est contraint d’aller résider à la cour de Tamerlan à Samarcande. Tamerlan marche alors vers le Khorassan partagé entre les Sarbadârs dirigés par Khwaja Ali-yi Mouayyad ibn Massoud, et deux autres principautés l’une dirigée par l’émir Walî (1360-1384) qui s’est rendu maître du Mazandaran, le Gorgan, et la province de Semnan, enfin Alî beg maître de Kalat et Tus dans la région du Khorasan-e-razavi. À l’approche de Tamerlan, Alî beg fait allégeance, Khwaja Ali-yi Mouayyad ibn Massoud menacé par son voisin l’émir Walî appelle à l’aide Tamerlan et fait lui aussi allégeance. Enfin après un bref siège d’Esfarayen l’émir Walî est vaincu et la ville est détruite. Pendant l’hiver 1381/1382, Tamerlan assiège Alî beg dans la forteresse de Kélat. Peu après, Alî beg est envoyé en Transoxiane et exécuté (1382). Tamerlan reprend sa campagne contre l’émîr Walî, qui lui envoie un tribut. En 1383, Tamerlan revient de Samarcande et châtie terriblement Sabzevar révoltée. « On entassa près de deux mille prisonniers tout vivants, les uns sur les autres, avec de la boue et de la brique pour en construire des tours. » Le Sistan également révolté eut un sort identique[12].

Liens externes

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Bibliographie

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Notes et références

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  1. Sarbédâriens utilisé par René Grousset, Op. cit. (lire en ligne), « La Transoxiane sous le gouvernement de l’émir Qazghân. », p. 431 (.pdf)
  2. Ibn Battûta décrit ainsi les actions des Sarbadârs :

    « Il y avait dans le Khorassan deux hommes, appelés l’un Ma’çoûd et l’autre Mohammed, et qui avaient cinq compagnons audacieux. Ils étaient connus dans l’Irâk sous le nom de Chotthâr, Brigands, Voleurs ; dans le Khorassan, sous celui de Serbedârs ; et enfin, dans le Maghreb, sous celui de Sokoûrah, Oiseaux de proie, Vautours.
    Tous sept convinrent de se livrer au désordre et au brigandage, et de piller l’argent des habitants. Le bruit de leurs excès se répandit ; ils établirent leur séjour sur une montagne inexpugnable, située au voisinage de la ville de Beïhak, appelée aussi Sebzévâr. Ils se plaçaient en embuscade pendant le jour, en sortaient le soir et durant la nuit, fondaient sur les villages, coupaient les communications et s’emparaient des richesses des habitants. Les méchants et les malfaiteurs, leurs pareils, vinrent en foule se joindre à eux ; leur nombre devint considérable, leur puissance augmenta, et les hommes les craignaient. Ils fondirent sur la ville de Beïhak et la prirent ; puis ils s’emparèrent d’autres villes, acquirent de l’opulence, rassemblèrent des troupes et se procurèrent des chevaux. Maç’oûd prit le titre de sultan. Les esclaves s’enfuyaient de la maison de leurs maîtres et se retiraient près de lui. Chacun de ces esclaves fugitifs recevait de lui un cheval et de l’argent ; et, s’il montrait de la bravoure, Maç’oûd le nommait chef d’un détachement. Son armée devint nombreuse et sa puissance considérable. Tous ses partisans embrassèrent la doctrine des shiites, et entreprirent d’extirper les sonnites du Khorassan et de soumettre cette province tout entière aux dogmes râfidhites. Il y avait à Mechhed Thoûs un cheïkh râfidhite nommé Haçan, qui était considéré par eux comme un homme pieux. Il les assista dans leur entreprise et ils le proclamèrent khalife ; il leur ordonna d’agir avec équité. Ils firent paraître une si grande probité que des dînârs et des dirhems tombaient à terre, dans leur camp, et que personne ne les ramassait, jusqu’à ce que leur propriétaire survînt et les ramassât. Ils s’emparèrent de Neïçâboûr. Le sultan Thoghaïtomoûr envoya contre eux des troupes, mais ils les mirent en déroute. Le sultan fit alors marcher son lieutenant, Arghoûn Châh, qui fut vaincu et fait prisonnier. Ils le traitèrent avec bonté. Thoghaïtomoûr les combattit en personne, à la tête de cinquante mille Tartares ; mais ils le défirent, s’emparèrent de plusieurs villes, entre autres de Sarakhs, de Zâveh, de Thoûs, une des principales places du Khorassan. Ils établirent leur khalife dans le mechhed, mausolée, d’Aly, fils de Moûça Arridha. Ils prirent aussi la ville de Djâm et campèrent tout auprès, avec l’intention de marcher contre Hérat, dont ils n’étaient qu’à six journées de distance. »

    — Ibn Battûta, Op. cit, vol. II (lire en ligne), « Histoire des Râfidhites », p. 251-252 (.pdf).

  3. Pahlavân en persan : pahlavan ou pahalavan, پهلوان, héros.
  4. Sardâr en persan : sardār, سردار, général en chef.
  5. (en) Chahryar Adle, « Dāmḡān », dans Encyclopædia Iranica (lire en ligne)
  6. Forûmad, Farumad, Furmak, ou Faryûmad en persan farūman, فرومد. C’est actuellement un simple village dans la province de Semnan, à la limite avec la province du Khorassan. 36° 31′ 09″ N, 56° 44′ 40″ E, d’après « Iran > Places > Forshom to Fotuhabad », sur indexmundi.com.
    On peut voir des photos des ruines de la grande mosquée de Forûmad sur « Forumad »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur archnet.org.
    Voir aussi (en) Chahryar Adle, « Faryūmad (modern Farūmad) », dans Encyclopædia Iranica (lire en ligne)
  7. (en) J. Aubin, « ʿAbd-al-Razzāq Bāštīnī », dans Encyclopædia Iranica (lire en ligne)
  8. Thoghaïtomoûr dans le texte d'Ibn Battûta, Togha Temür ou Taghay Temür
  9. a et b René Grousset, Op. cit. (lire en ligne), « Dissolution du khanat mongol de Perse. », p. 489-490 (.pdf)
  10. gholâm en persan : ḡolām, غلام, serviteur ; esclave équivalent de l’arabe mamelouk : mamlūk, مملوك, possédé au pl. mamālīk, مماليك, qui avaient disparu avec la période mongole, redeviennent importants avec l’Il-Khanide Ghazan. Lorsqu’une terre attribuée (eqtâ` en persan : eqṭāʿ, اقطاع, parcelle de terrain attribuée à qqn.) reste sans héritier, elle est attribuée à un de ces soldats-esclaves âgés. Voir (en) H. Algar, « Barda and bardadārī, slaves and slavery. », dans Encyclopædia Iranica (lire en ligne)
  11. (en) J. M. Smith, Jr., « Ay Tīmūr (or Teymūr), Moḥammad », dans Encyclopædia Iranica (lire en ligne)
  12. a et b René Grousset, Op. cit. (lire en ligne), « Conquête de l’Iran oriental par Tamerlan. », p. 534-536 (.pdf)