Alfred Stevens (peintre belge) — Wikipédia

Alfred Stevens
Alfred Stevens
Photographie de l'album Manet, BNF Gallica
Naissance
Décès
Sépulture
Cimetière du Père-Lachaise, Grave of Stevens (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Période d'activité
Nom dans la langue maternelle
Alfred Émile Léopold StevensVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Activité
Formation
Maîtres
Lieux de travail
Mouvement
Influencé par
Fratrie
Joseph Stevens
Arthur Stevens (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Parentèle
Robert Mallet-Stevens (petit-neveu)
Mathilde Kindt (belle-sœur)Voir et modifier les données sur Wikidata
Distinctions
Œuvres principales

Ce que l'on appelle le vagabondage, Chez soi, Tous les bonheurs

Ophelia. Le Bouquet effeuillé,
Compléments
Combattant dans Garde nationale lors du Siège de Paris (1870)
Vue de la sépulture.

Alfred Stevens, né le à Bruxelles et mort le à Paris, est un peintre belge. Élève d'Ingres à École nationale supérieure des beaux-arts de Paris à partir de 1844, sa carrière a connu une ascension fulgurante tant en Belgique qu'en France où il a passé la plus grande partie de sa vie. Très introduit dans les milieux artistiques et mondains de la capitale, il était l'ami d'Édouard Manet, Berthe Morisot, Alexandre Dumas (fils) tandis que son frère, Arthur Stevens (nl), marchand d'art installé à Paris et à Bruxelles, œuvrait pour faire connaître les peintres français. Stevens a en commun avec Manet un modèle féminin : Victorine Meurent qui pose pour Olympia.

D'abord en retrait du courant impressionniste, aimé pour ses scènes de genre dont le sujet est en majorité de jeunes élégantes, ses tableaux se vendent à des prix très élevés. Mais à partir de 1883, saisi d'un doute devant la montée de l'impressionnisme, Stevens a reconsidéré sa peinture et a réalisé des paysages impressionnistes. Pour l'Exposition universelle de 1889, il reçoit la commande d'une fresque panoramique, aujourd'hui propriété des musées des beaux arts de Bruxelles : Le Panorama du siècle.

1844-1866 : une ascension rapide

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Fils du Bruxellois Léopold Stevens (mort en 1837) ancien officier passionné de peinture et collectionneur en particulier des œuvres de Théodore Géricault et Eugène Delacroix, Alfred Stevens est le frère du peintre animalier Joseph Stevens et du marchand de tableaux Arthur Stevens (1825-1890)[1]. Il est aussi le père du peintre Léopold Stevens.

Après une formation dans l'atelier de François-Joseph Navez[2], il est très vite lancé à Paris où il s’est installé en 1844 sur les conseils de Camille Roqueplan, dont il a fréquenté l'atelier. Il devient l'ami d'Édouard Manet, Charles Baudelaire, Aurélien Scholl. Il a été admis à l'École nationale supérieure des beaux-arts, dans l'atelier d'Ingres. À cette époque, Stevens paraît dans le registre des copistes du Louvre en tant qu'élève du peintre d'histoire Joseph-Nicolas Robert-Fleury[3]. Il fréquente ensuite l'atelier du peintre de genre Florent Willems, chez qui il trouve ses premiers modèles[4]. Il retourne ensuite à à Bruxelles où il expose en 1851 des tableaux parmi lesquels Le Soldat blessé, première esquisse d'un genre qu'il approfondit avec des œuvres témoignant de la misère urbaine.

De retour à Paris, il présente à l'Exposition universelle de 1855 quatre tableaux : La Sieste, Le Premier jour du dévouement, La Mendiante, et aussi Les Chasseurs de Vincennes dit aussi Ce qu'on appelle le vagabondage, que Émilien de Nieuwerkerke voulait faire retirer car le sujet déconsidérait l'armée impériale, l'œuvre présentant des soldats arrêtant des vagabonds[5],[6]. Le tableau attira l'attention de Napoléon III, qui ordonna que les soldats ne soient plus employés à chasser les pauvres dans les rues [7], et que les pauvres soient transportés en voiture à la Conciergerie [8].

Le peintre abandonne bientôt les miséreux comme veine d'inspiration pour se consacrer aux représentations de la femme contemporaine, alternant encore avec des scènes militaires. Au Salon d'Anvers, la même année, l'artiste est décoré par le roi Léopold Ier pour son tableau Chez soi, représentant une jeune femme se chauffant. En 1858, il épouse Marie Blanc. Il a pour témoins Alexandre Dumas (fils), Eugène Delacroix et un grand nombre de personnalités des arts[5].

À partir de 1860, il connaît un énorme succès grâce à ses tableaux de jeunes femmes habillées à la dernière mode posant dans des intérieurs élégants, à la fois intimistes et mondains. Ceux exposés au Salon de peinture et de sculpture de 1861 lui valent un grand nombre d'admirateurs. Il présente entre autres : Tous les bonheurs ayant pour sujet une femme allaitant, huile sur toile, 116,5 × 89,5 cm, Musées royaux des beaux-arts de Belgique, à Bruxelles[9],Une Veuve et ses enfants, huile sur toile, 114,5 × 160,5 cm, Musées royaux[10], Mauvaise nouvelle[5], encore intitulée La Lettre de rupture, huile sur toile 745 × 54 cm conservée au musée d'Orsay[11], Le Bouquet surprise, Une mère, Le convalescent[5]...

En 1862, Édouard Manet peindra dans l'atelier du peintre belge - 18, rue Taitbout - plus spacieux que le sien. L'huile sur toile Le ballet espagnol, 60,9 x 90,4 cm, est exposée à Washington (The Phillips Collection)[12].

Le , Stevens rencontre Whistler à Londres[13], quelques jours après l'ouverture du Salon de peinture et de sculpture de Paris où Stevens expose plusieurs toiles ; tandis que Whister présente sa Fille en blanc (Symphony in White, N°1 : The White Girl) au salon des refusés, ouvert le .

1867-1872 : l'apogée et le courage

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Dans les années qui vont suivre, Alfred Stevens est non seulement un peintre reconnu, mais c'est aussi le plus parisien des Belges, qui va tenter avec son frère Arthur d'introduire les artistes français en Belgique. Arthur propose d'ailleurs un contrat à Edgar Degas pour 12 000 francs par an, Alfred pousse Manet à envoyer un tableau au Salon des beaux arts de Bruxelles de 1869, Clair de lune sur le port de Boulogne[5]. Dans les années 1860, Arthur Stevens est le propagandiste de l'école de Barbizon dont le succès ne se révèlera pleinement qu'à partir de 1870 avec la présence à Bruxelles d'une succursale de la Galerie Durand-Ruel[14].

Il rencontre Baudelaire et Eugène Delacroix, qui le cite dans son Journal du pour le prêt d'une tunique turque. Il influence James Whistler avec qui il partage un enthousiasme pour les estampes japonaises.

Dès 1867, Alfred Stevens a triomphé à l'Exposition universelle où il a présenté 18 toiles, qui lui valent l'obtention de la médaille d'or et la promotion au grade d'officier de la Légion d'honneur, parmi lesquelles : Le Bain et L'Inde à Paris (dit aussi Le Bibelot exotique)[15], que le critique d'art Robert de Montesquiou salue ainsi dans la Gazette des beaux-arts : « Le portrait est celui de Cachemire. Il l'a peint comme son maître Vermeer aurait fait d'une de ces cartes de géographie qu'il donnait pour fond à des femmes pensives[16]. »

Stevens devient un ami de Bazille et un habitué du café Guerbois et du café Tortoni. Avec la vogue du japonisme, il est aussi l'un des tout premiers peintres de l'époque, avec James Tissot, James Whistler ou Édouard Manet, à s'intéresser aux objets d'Extrême-Orient[17],[18],[19],[20],[21] qu'il trouve notamment dans le magasin de La Porte chinoise, rue Vivienne à Paris, fréquenté aussi par ses amis Charles Baudelaire et Félix Bracquemond. Parmi ses premiers tableaux japonisants on trouve La Dame en rose de 1866, suivi par Le Bibelot exotique de 1867, La collectionneuse de porcelaines en 1868[22], puis une série de plusieurs toiles de jeunes femmes en kimono réalisées vers 1872. Confirmé par Claude Pichois, Adolphe Tabarant révèle aussi que sous le pseudonyme de J. Graham il a donné au journal Le Figaro plusieurs chroniques vantant le talent de Manet, dont Le Déjeuner sur l'herbe qui figure au Salon des refusés[5].

Sa carrière encouragée par Mathilde Bonaparte et la princesse de Metternich a connu une ascension fulgurante. Mais en dépit du confort que procure la célébrité, Stevens demande à Étienne Arago, maire de Paris, l'autorisation de s'engager dans la Garde nationale pour combattre aux côtés de ses amis lors du Siège de Paris (1870). « Je suis à Paris depuis vingt ans, j'ai épousé une Parisienne, mes enfants sont nés à Paris, mon talent, si j'en ai, je le dois en grande partie à la France[16]. »

C'est encore par l'intermédiaire d'Alfred Stevens que Manet va faire la connaissance du marchand de tableaux Paul Durand-Ruel, et de son cercle de relations : Degas, Morisot. Tout-Paris fréquente désormais l'atelier de Stevens situé d'abord au 12, rue Laval qui deviendra, le , le second cabaret du Chat Noir de Rodolphe Salis dans les locaux du peintre, et où sont jouées des pièces pour un théâtre d'ombres imaginé par Henri Rivière[23], puis rue des Martyrs et, à partir de 1880, rue de Calais. Goncourt qui lui rend souvent visite décrit le luxe dans lequel il vit.

À cette même époque, Stevens a créé un atelier de peinture pour femmes avenue Frochot, fréquenté par Sarah Bernhardt dont le peintre fera le portrait[16]. Parmi les élèves les plus assidues de cette école, qui selon l'auteur belge Camille Lemonnier « avait été en son temps la plus belle école de Paris... »[24] certaines se consacreront entièrement à la peinture et seront des artistes reconnues de leur temps comme Louise Desbordes, Alix d'Anethan, Georgette Meunier, Clémence Roth ou Berthe Art. Il faut noter que cette école de peinture pour femmes fut le seul lieu ou s'exerça à proprement dit le professorat de Stevens qui n'avait pas de collaborateurs et ne forma pas de continuateurs[25]. Outre Sarah Bernhardt qui fut une de ses premières élèves et dont le peintre a réalisé plusieurs portraits, il est probable que certaines de ses élèves lui ont servi de modèle en même temps qu'il leur rendait hommage en les immortalisant sur la toile, telle Louise Desbordes pour le portrait en pied de la jeune artiste lyrique dans le tableau Un chant passionné ou Clémence Roth représentant la parisienne amatrice d'art vêtue de noir en allusion à son veuvage dans le tableau Dans l'atelier[26].

La mort de Manet, en 1883 va beaucoup l'affecter. Stevens traverse une période de doute devant l'arrivée de l'impressionnisme. Commence alors une période de recherche dans laquelle Berthe Morisot joue un rôle prépondérant[27].

La remise en question

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Tombe au cimetière du Père-Lachaise.

Dans les années 1880 Stevens traverse une crise morale qui l'amène à remettre en question tout ce qu'il fait. Élève d'Ingres, souvent proche de Gustave Courbet, ou de Manet avec Ophelia. Le Bouquet effeuillé[28], il a peint jusque-là avec une rigueur qu'il abandonne parfois sous l'influence d'autres peintres. C'est le cas de La Jeune mère[29] qui rappelle le style de Berthe Morisot[16].

Ses peintures s'arrachent, le roi des Belges Léopold II lui commande Les Quatre saisons, les Vanderbilt lui achètent des toiles au prix fort, et pourtant, vers 1883, saisi à la fois d'une grande fatigue physique et d'un doute sur son travail, Stevens part à Menton sur les conseils de son médecin. Et là, il se livre à des expérimentations : des paysages impressionnistes.

Il peint aussi des marines et des scènes côtières dans un style plus libre, presque impressionniste, proche d'Eugène Boudin ou de Johan Barthold Jongkind.

Vers la fin de sa vie, son style n’est pas sans similitude avec celui de son contemporain John Singer Sargent.

Il publie en 1886 Impressions sur la peinture, qui connaît un grand succès.

C'est, en 1900, le premier artiste vivant à obtenir une exposition individuelle à l’École des beaux-arts de Paris.

Il arrête de peindre à partir des années 1890 à la suite de problèmes de santé et il meurt au no 17 avenue Trudaine à Paris en 1906[30]. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (32e division).

Ses tableaux ont été très populaires jusqu'en Amérique, où les tout-puissants Vanderbilt aux États-Unis en achetèrent plusieurs. La plupart restèrent cependant en France ou en Belgique.

Sélection d'œuvres

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Alfred Stevens est :

Bibliographie

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  • Sophie Monneret, L'Impressionnisme et son époque, vol. 2, t. 1, Paris, Robert Laffont, , 997 p. (ISBN 978-2-221-05412-3)
  • Sophie Monneret, L'Impressionnisme et son époque : dictionnaire international, vol. 2, t. II, Paris, Robert Laffont, , 1185 p. (ISBN 978-2-221-05413-0)
  • François Boucher, Alfred Stevens, éditeur Rieder, Paris, 1930.
  • G. Van Zype, Les Frères Stevens, 1936.
  • Alfred Stevens, Fonds Mercator, Bruxelles, 2009, 207 p.

Notes et références

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  1. Monneret, p. 915
  2. François Boucher, Alfred Stevens, Paris, Rieder, p. 6-7
  3. Danielle Derrey-Capon, Alfred Stevens 1823 Bruxelles - Paris 1906, Bruxelles, [Fonds Mercator], (lire en ligne), "Alfred Stevens : les débuts" p.108
  4. François Boucher, Alfred Stevens, Paris, Rieder, p. 12-15
  5. a b c d e et f Monneret, p. 916
  6. Ce qu'on appelle le vagabondage, huile sur toile 130 × 160 cm, Musée d'Orsay, site musee-orsay.fr
  7. Zana Bihiku Tutt'Art, « Alfred Stevens | Academic Classical painter », sur Tutt'Art@ | Pittura * Scultura * Poesia * Musica (consulté le )
  8. « Ce que l'on appelle le vagabondage - Alfred Stevens | Musée d'Orsay », sur www.musee-orsay.fr (consulté le )
  9. Tous le bonheurs
  10. Une Veuve et ses enfants
  11. La Lettre de rupture
  12. Danielle Derrey-Capon, Alfred Stevens 1823 Bruxelles - Paris 1906, Bruxelles, [Fonds Mercator], (lire en ligne), "Edouard Manet: amitié et fidélité" p.21
  13. Lettre de Whistler à Stevens, 9 mai 1863, site whistler.arts.gla.ac.uk.
  14. Monneret, p. 480
  15. L'Inde à Paris ou Le Bibelot exotique, Alfred Stevens, 1867, huile sur toile, 73,7 × 59,7 cm, localisation inconnue, site wikiart.org.
  16. a b c et d Monneret, p. 917
  17. Alfred Stevens et le japonisme, site users.clas.ufl.edu
  18. Alfred Stevens, графиня Анна Варвик, 13/07/2006, site anna-warvick.livejournal.com.
  19. Prête pour le bal.
  20. La Dame à l'éventail.
  21. Prête à sortir.
  22. La Collectionneuse de porcelaines, 1868, North Carolina Museum of Art., site ncartmuseum.org.
  23. Blandine Bouret, « Mémoires des lieux. Les ateliers du bas-Montmartre. II : autour de la place Pigalle », La Gazette de l'Hôtel Drouot, no 22, 1er juin 2001, p. 44-46.
  24. Camille Lemonnier et Alfred Stevens, Alfred Stevens et son œuvre suivi des Impressions sur la peinture par Alfred Stevens, Bruxelles, G. Van Oest, , 60 p.
  25. Paul Lambotte, « Alfred Stevens », L'Art flamand et hollandais, Revue mensuelle illustrée,‎ , p. 153 à 180 (lire en ligne)
  26. (it) Fabio Sottili, « Clémence Roth : una pittrice da Salon nell' età dell' Impressionismo », Bollettino della Academia degli Euteleti della città di San Miniato n°86,‎
  27. Monneret, p. 602
  28. Ophelia. Le Bouquet effeuillé, 1867, huile sur toile, Musées royaux des beaux-arts de Belgique.
  29. La Jeune mère, 1868, huile sur toile, Dumbarton Oaks Museum, Washington DC
  30. Archives de Paris, Acte de décès à Paris 9e, 17 avenue Trudaine, no 1081, vue 20/31.
  31. La dame en rose
  32. Clémence Allard, veuve du banquier Prosper Crabbe, épouse le baron Léon du Mesnil de Saint-Front en 1895.
  33. Jeune femme lisant
  34. (en) « Portrait of a young woman », sur National Gallery of Ireland (consulté le )
  35. Le Masque japonais chez Sotheby's en 2007
  36. Chefs-d’oeuvre des Musées de Liège, Lausanne, Fondation de l’Hermitage, , 168 p., p. 21
  37. Moniteur, « Nominations », Moniteur belge, no 135,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).
  38. Site de l'exposition

Liens externes

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