Attentats de 1985-1986 en France — Wikipédia

Attentats de en France
Image illustrative de l’article Attentats de 1985-1986 en France
Les Galeries Lafayette Haussmann (ici lors des fêtes de Noël ) ont été une des cibles de ces attentats.

Localisation Paris, La Défense, Drapeau de la France France
Cible Civils
Date entre et
Type Attentats à la bombe
Armes Engin explosif improvisé
Morts 14
Blessés 303
Auteurs Fouad Ali Saleh
Organisations drapeau du Jihad islamique Hezbollah
Mouvance Terrorisme islamiste, islamisme chiite

Les attentats de en France sont une série d'attaques terroristes qui se sont déroulées entre et à Paris et en Île-de-France.

La France refuse d'entériner la domination de fait du Hezbollah sur une partie du Liban, et cherche à jouer des rivalités entre le Hezbollah, l'OLP, le Fatah, les Palestiniens pro-syriens et les Druzes pour bloquer la progression du Hezbollah. L'opposition du Hezbollah à la France va se manifester par plusieurs attentats et prises d'otages, bien qu'il soit difficile d'affirmer qu'il ait existé une stratégie coordonnée[1].

Chronologie

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 : structuration du réseau

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Fouad Ali Saleh, né à Paris, de nationalité tunisienne, est expulsé d'Iran[réf. nécessaire] en et arrive à Paris. Il rencontre Mohamed Mehdi, membre du Hezbollah libanais, et plusieurs de ses amis. Ce sont eux qui déposeront les explosifs. À côté de ce groupe, plusieurs individus auront un rôle de soutien logistique[2],[3].

 : deux bombes

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Les premiers attentats ont lieu au rayon vaisselle du sous-sol des Galeries Lafayette et au rayon parfumerie du rez-de-chaussée du Printemps Haussmann, faisant au total 43 blessés. L'enquête, dirigée par le juge Alain Marsaud, aboutira à la culpabilité du groupe Abou Nidal pour le compte du Hezbollah[4].

et

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Quatre bombes sont posées à Paris en et trois en . Ces attentats sont revendiqués par le « Comité de solidarité avec les prisonniers politiques arabes et du Proche-Orient ». Ils sont commis avec des moyens artisanaux et sur la base d'un explosif, le C-4, mélange d'octogène et d'hexogène[5].

Plusieurs pistes sont envisagées : milieux chiites iraniens, tunisiens et libanais en France, ainsi que le Koweït peuplé de très nombreux chiites iraniens. Une série d'interpellations est ordonnée le . Elle vise de nombreuses personnes appartenant au foyer Ahl El Beit, foyer qui sert de lieu de rendez-vous à l'intégrisme chiite. Mais aucune charge ne peut être retenue contre les personnes interpellées, qui sont libérées et expulsées. Le gouvernement estime qu'il s'agit d'un message du djihad essentiellement lié à la libération des membres de son organisation emprisonnés au Koweït, et dont on vient d'annoncer la condamnation à mort, ainsi qu'une pression supplémentaire sur la France pour qu'elle libère Anis Naccache, puisque le marchandage des otages au Liban ne semble pas suffisant[5].

Après les élections législatives du , la droite revient au gouvernement et négocie avec l'Iran sans que cela ne stoppe les attentats[6].

Les attentats sont d'abord attribués par le ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, et par son ministre délégué à la Sécurité, Robert Pandraud, aux Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL), une organisation communiste à laquelle Georges Ibrahim Abdallah avait appartenu. Robert Pandraud reconnait ultérieurement : « Je me suis dit, qu'au fond, mettre en avant la piste Abdallah ne ferait pas de mal, même si ça ne faisait pas de bien. En réalité, nous n'avions alors aucune piste ». L'ensemble de la presse française reprit cette thèse, contribuant à alourdir la condamnation de Georges Ibrahim Abdallah (réclusion à perpétuité). Le juge antiterroriste Alain Marsaud souligne dans ses mémoires intitulées Avant de tout oublier[7] : « Il est désormais évident qu'Abdallah fut en partie condamné pour ce qu'il n'avait pas fait »[8].

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Les attentats de , dont celui rue de Rennes, sont les plus meurtriers et prennent de court le gouvernement. On suppose très rapidement qu'il a fallu des soutiens étatiques importants pour cette campagne d'attentats et toutes les pistes redeviennent ouvertes[9].

Le réseau n'ayant plus d'explosifs, Fouad Saleh est obligé de partir à Beyrouth pour rendre compte de ses actions et pour en recommander[10].

 : arrestation du groupe Ali Fouad Saleh

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Lofti Ben Khala, interpellé en , se propose de devenir un informateur. Il désigne aux services de polices un groupe d'individus qui habitait un appartement dans le 12e arrondissement de Paris. La Direction de la Surveillance du territoire pose des écoutes téléphoniques et des micros et le , apprend que les membres du réseau vont déplacer les explosifs stockés dans l'appartement. Les poseurs de bombes sont arrêtés[11].

Affaire Gordji

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Le juge Gilles Boulouque souhaite entendre Wahid Gordji, l'interlocuteur iranien du gouvernement français dans l'affaire des otages, qui serait lié aux attentats. En , Charles Pasqua et Robert Pandraud décident de mettre sous surveillance l'ambassade d'Iran en France. Le , le premier secrétaire de l'ambassade française est arrêté par les Iraniens. Mais entre-temps l'enquête judiciaire s'est poursuivie et les charges retenues contre Gordji s'effondrent une à une : il est impossible de prouver l'implication directe de l'Iran dans les attentats bien que certains indices puissent conduire logiquement à eux[12].

Liste des attentats

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Date Lieu Ville Morts Blessés
Galeries Lafayette Haussmann et Printemps Haussmann Paris 0 43 [13] [a]
Galerie marchande de l'hôtel Claridge, avenue des Champs-Élysées Paris 1 8 [5] [b]
Toilettes du 3e étage de la Tour Eiffel Paris 0 0 [5]
Librairie Gibert Jeune Paris 0 5 [5] [c]
Magasin Fnac Sport du Forum des Halles Paris 0 22 [5] [d]
TGV Paris Lyon, train 607, voiture 6 Brunoy (91) 0 9 [6] [e]
Galerie Point Show, avenue des Champs-Élysées Paris 2 29 [6] [f]
Ligne A du RER, entre les gares d'Auber et Châtelet - Les Halles Paris 0 0 [6] [g]
Quais RER de la gare de Lyon Paris 0 0 [9]
Bureau de poste de l'hôtel de ville de Paris Paris 1 21 [9] [h]
Cafétéria Casino aux Quatre Temps, centre commercial de La Défense Puteaux (92) 0 54 [9] [i]
Pub Renault, 53 avenue des Champs-Élysées (engin explosif déplacé dans un sous-sol de la rue Marbeuf où il explose) Paris 2 1 [9] [j]
Service des permis de conduire de la préfecture de police Paris 1 56 [9] [k]
Devant le magasin Tati, 140 rue de Rennes Paris 7 55 [9] [l]
Total 14 303

Pour son implication reconnue déterminante, la cour d'assises spéciale de Paris condamne Fouad Ali Saleh à la réclusion criminelle à perpétuité le , avec une période de sûreté de dix-huit ans. Hassan Aroua, le chauffeur tunisien de 38 ans, Abdelhamid Badaoui (33 ans) et Omar Agnaou (30 ans), les deux « étudiants » marocains qui ont stocké les explosifs, sont condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité mais sans période de sûreté[14]. Les cinq protagonistes de ces attentats, en fuite, sont condamnés par contumace le à la réclusion criminelle à perpétuité : il s'agit du « cerveau », Abdelhadi Hamade, de ses deux lieutenants, Ibrahim Akil et Hassan Goshn, et des deux « artificiers », Hussein Mazbouh et Haidar Habib[15].

Portée et répercussions

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Plaque commémorative au 140 bis de la rue de Rennes à Paris.

La loi du relative à la lutte contre le terrorisme crée des juridictions spécialisées, ainsi que le fonds de garantie chargé de l'indemnisation des dommages corporels consécutifs à un acte de terrorisme.

Françoise Rudetzki, qui s'est longtemps battue pour instaurer ce fonds, a été victime d'attentats antérieurs en .

Les attentats de Saleh et de son groupe modifient considérablement la perception du terrorisme international au milieu des années . Leur nombre (presque autant en un an que durant les quinze années précédentes[16]), leur intensité (jusqu'à quatre attentats en trois jours, le ciblage du grand public (Champs-Élysées, tour Eiffel, Gibert Jeune, Forum des Halles, TGV, RER, magasins Tati, bureau de poste, etc.) et l'horreur[17] sont alors inégalés. « Les services de l'État, l'Intérieur, la Justice, sont dépassés »[18]. Trente ans plus tard, en , ces attentats restent parmi les dix attaques terroristes les plus meurtrières perpétrées en France depuis [19].

D'autre part, la mise en évidence d'un commanditaire étatique de la taille de l'Iran est un facteur aggravant, ainsi que la découverte du nombre et de la violence des attaques en cours de préparation[20], ainsi que l'étendue européenne des réseaux pilotés par l'Iran via le Hezbollah, jusqu'en Afrique[21].

Ces attentats ont un grand retentissement. Celui contre le magasin Tati, à l'époque « l'attentat le plus sanglant jamais perpétré contre des civils en France », donne lieu trois ans plus tard à une cérémonie rue de Rennes conduite par le président de la République, François Mitterrand, et le maire de Paris, Jacques Chirac[22]. Le New York Times couvre dans un long article son jugement qu'il considère comme « un procès majeur du terrorisme »[23] et les déclarations de Fouad Ali Saleh sont publiées dans Le Monde et Libération[24]. En , un livre de plus de 400 pages[25] relate les circonstances de son arrestation, qui n'est obtenue qu'après plus d'un an et demi d'une enquête insoluble[26]. En est diffusé L'Affaire Gordji : Histoire d'une cohabitation, un téléfilm qui met en scène les conséquences, au plus haut niveau de l'État, de l'implication de l'Iran intégriste dans les attentats perpétrés par Saleh. En est publié le roman J'irai tuer pour vous d'Henri Lœvenbruck, dont l'action débute pendant la vague d'attentats[27],[28].

Notes et références

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  1. Bigo 1991, Les motivations du Hezbollah.
  2. Bigo 1991, Les arrestations du groupe Fouad Saleh.
  3. Bigo 1991, Les indices concernant la participation d'auteurs libanais.
  4. « Les attentats dans les grands magasins », Le Nouvel Observateur, (consulté le ).
  5. a b c d e et f Bigo 1991, Les attentats de et la piste iranienne.
  6. a b c et d Bigo 1991, Les attentats de et la piste Abdallah.
  7. Alain Marsaud, Avant de tout oublier, Paris, Denoël, coll. « Impacts », , 252 p. (ISBN 2-207-25336-8).
  8. Pierre Carles et Pierre Rimbert, « Des plumes empoisonnées », Manière de voir, no 172,‎ (lire en ligne).
  9. a b c d e f et g Bigo 1991, Les attentats de et la piste syro/abdalienne.
  10. Bigo 1991, Les réseaux transfrontières mis au point par le Hezbollah : manque de moyens, amateurisme... mais efficacité malgré tout.
  11. Bigo 1991, La nouvelle série prévue en .
  12. Bigo 1991, Les indices concernant la participation directe des Iraniens dans les attentats.
  13. Bigo 1991, Les attentats de et la criminalisation.
  14. Jacques Cordy, « Les attentats de à Paris, devant la cour d'assises : la perpétuité pour Fouad Ali Saleh », Le Soir, (version du sur Internet Archive).
  15. Julien Fragnon (sous la dir. de Paul Bacot), Le discours antiterroriste : La gestion politique du en France (thèse en science politique au laboratoire Triangle, no 2009LYO22006), Université Lumière-Lyon-II, (HAL tel-01447971, SUDOC 155326147, présentation en ligne), n. 385.
  16. Voir le graphique « Nombre d'attentats meurtriers en France depuis les années  » sur Jean-Marie Pottier, « La France n'avait pas connu trois attentats aussi rapprochés depuis  », sur Slate, (consulté le ).
  17. Marc Knobel, « Paris, à feu et à sang », sur crif.org, CRIF, (consulté le ).
  18. Jean-Louis Bruguière, Les voies de la terreur : terrorisme, les racines du mal, Paris, Fayard, , 304 p. (ISBN 978-2-213-68475-8, lire en ligne).
  19. « L'attentat le plus meurtrier en France depuis 40 ans », Ouest-France, (consulté le ).
  20. Bigo 1991.
  21. « Europe : les réseaux du HizbAllah », Notes & Études de l'Institut de criminologie de Paris, nos 15–17,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  22. Bernard Pradinaud, « Mitterrand-Chirac rue de Rennes », extrait du Journal de 20 h d'Antenne 2, L'INA éclaire l'actu, sur ina.fr, Institut national de l'audiovisuel, (consulté le ).
  23. (en) Youssef M. Ibrahim, « Trial of Accused Mastermind In Bombings Begins in Paris », The New York Times, (consulté le ).
  24. Journaux des et , et et , cités par Yves Lacoste, « Géopolitique des religions », Hérodote, no 106 « Religions et géopolitique »,‎ , p. 3–15 (ISBN 2-7071-3808-8, DOI 10.3917/her.106.0003, lire en ligne).
  25. Trapier 2000.
  26. Patricia Tourancheau, « Rue de la Voûte, la taupinière de la DST », Libération, (consulté le ).
  27. Karen Lajon, « "J'irai tuer pour vous" : mon ami le barbouze », Le Journal du dimanche, .
  28. Henri Lœvenbruck, J'irai tuer pour vous, Paris, Flammarion, , 635 p. (ISBN 978-2-08-135794-5).

Sur sos-attentats.org, le site de l'association SOS Attentats :

  1. « Galeries Lafayette et Le Printemps :  » (version du sur Internet Archive).
  2. « Galerie du Claridge :  » (version du sur Internet Archive).
  3. « Librairie Gibert-Jeune :  » (version du sur Internet Archive).
  4. « FNAC Sports, Forum des Halles :  » (version du sur Internet Archive).
  5. « TGV - Ligne Paris - Lyon :  » (version du sur Internet Archive).
  6. « Galerie Point Show :  » (version du sur Internet Archive).
  7. « RER, Ligne A (tentative d'attentat) :  » (version du sur Internet Archive).
  8. « Bureau de Poste de l'Hôtel de Ville de Paris :  » (version du sur Internet Archive).
  9. « Cafétéria du Magasin Casino :  » (version du sur Internet Archive).
  10. « Pub Renault :  » (version du sur Internet Archive).
  11. « Préfecture de Police de Paris :  » (version du sur Internet Archive).
  12. « Rue de Rennes :  » (version du sur Internet Archive).

Bibliographie

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